Sans-papiers : Ethnographie de la menace
Au cours d’un long travail au plus près des sans-papiers, l’anthropologue Stefan Le Courant donne à voir des quotidiens en situation de péril imminent.
Pour caractériser le monde des étrangers en situation irrégulière, en prise avec un État qui ne cherche qu’à les expulser, Stefan Le Courant admet une difficulté : « faire de la menace un objet d’étude », c’est tenter d’« appréhender une présence qui se dérobe ». Car dans la vie des quarante personnes qui témoignent dans l’ouvrage de l’anthropologue, se dessine une discipline du risque permanent : il faut « anticiper le surgissement de policiers, guetter les signes annonciateurs d’une interpellation en préparation, prêter attention aux détails, se méfier des apparences ». Toute une collection de signes ténus, que le chercheur ne peut pas toujours saisir ou retranscrire, mais qui constituent le quotidien des personnes sans papiers.
C’est la force du travail de l’auteur, dont le livre prolonge une thèse soutenue en 2015 : en réalisant plus de 300 entretiens comme bénévole à la Cimade en tant qu’assistant juridique, entre 2005 et 2009, il permet d’appréhender ces vies sous le joug, en état d’urgence permanent dans chaque lieu traversé, au foyer, à la préfecture et bien sûr dans la rue, cet « espace par excellence de l’exercice policier ». Des vies croisées, cassées, présentes en France pour des raisons singulières mais qui se retrouvent confrontées au même fonctionnement kafkaïen d’un État dont le seul objectif affiché consiste à les « reconduire », quoi qu’il en coûte.
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