Économie : un kit de survie citoyen signé Thomas Porcher
Dans un dictionnaire engagé, le membre des Économistes atterrés offre un manuel de résistance aux théories dominantes. Un essai efficace et corrosif. Extraits.
dans l’hebdo N° 1726 Acheter ce numéro

Aujourd’hui, les questions économiques échappent à la majorité du grand public car leurs aspects techniques impressionnent. Beaucoup d’experts, qui ont bien compris les vertus du matraquage des idées, ont réussi à faire croire qu’en économie il n’y avait qu’un seul avenir envisageable : celui de la mondialisation, de la casse du service public et du capitalisme vert. De sorte qu’il a été possible de se demander si un candidat à la présidentielle de 2017, en l’occurrence Emmanuel Macron, était de gauche alors que son programme proposait de faire 15 milliards d’euros d’économies sur l’assurance-maladie, donc sur la santé. […]
La méconnaissance économique et le manque d’intérêt que suscite cette matière ont permis à certains de nos dirigeants de passer tranquillement les pires réformes en se drapant dans de beaux discours sur l’intérêt général. C’est ce manque de connaissance qui empêche tout débat sérieux sur des questions aussi essentielles que le service public, l’évasion fiscale, la réindustrialisation ou la lutte contre le réchauffement climatique. Et c’est cette absence de débats économiques qui a transformé les élections en concours de beauté entre candidats, où chacun y va de sa petite phrase, surjouant sa posture, et évite la confrontation d’idées. Pourtant, les choix de politiques économiques ont un impact majeur sur le cours de nos vies, ainsi que sur le monde que nous allons laisser à nos enfants. […]
Le manque de connaissance du grand public empêche tout débat sérieux sur le service public, l’évasion fiscale…
L’indignation, la dénonciation collective, les marches, les grèves sont nécessaires pour gagner des batailles, mais pas suffisantes pour gagner la guerre. Il faut ensuite pouvoir proposer un projet économique crédible.
Pour cela, il faut que chacun puisse maîtriser un certain nombre de termes clés et leurs enjeux sous-jacents. « Dépense publique », « marché », « finance », « Europe sociale », « attractivité d’un pays » sont des termes omniprésents dans les discours politiques, les débats télévisés et les articles de presse. Pourtant, peu de gens pourraient les définir clairement et dire ce qu’ils recouvrent en France ou à l’étranger.
Attractivité d’un paysPour beaucoup (trop) d’experts, l’attractivité d’un pays se résume à une fiscalité accommodante pour les entreprises et des règles plus souples en matière sociale ou d’accès aux marchés publics. Baisse de la fiscalité* et réglementations simplifiées seraient, nous dit-on, nécessaires pour attirer les investisseurs étrangers. Les faits contredisent ces arguments. Par exemple, dans les années 1980, en Corée du Sud, il fallait obtenir 299 permis auprès de 199 administrations pour ouvrir une usine, et cela n’a pas empêché le pays d’être attractif. Pourquoi ? Parce que son économie était dynamique et que, pour les investisseurs, le jeu en valait la chandelle. Les critères d’attractivité ne se résument donc pas à une question de fiscalité ou de réglementations. Ils prennent en compte la performance économique du pays, l’efficacité des entreprises présentes sur le marché, l’offre de services publics et, enfin, les infrastructures (routes, transports, écoles, etc.).
Par exemple, la France est une destination choisie par les investisseurs pour la qualité de ses infrastructures (transports, communications), de sa main-d’œuvre (parmi les plus productives au monde) et de sa recherche et développement. Trois éléments qui dépendent plus ou moins directement de l’action publique. Les infrastructures sont financées par l’État, tout comme la qualité de la main-d’œuvre via le système éducatif et la recherche. À
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