Toni Grand, formes vives

Au Musée Fabre, une superbe exposition met en lumière l’œuvre du sculpteur Toni Grand, aussi inventive que suggestive, intimement liée au vivant.

Jérôme Provençal  • 3 avril 2024 abonné·es
Toni Grand, formes vives
Une œuvre de 1980, en bois brut de sciage.
© F. Jaulmes/Musée Fabre/ADAGP

« Toni Grand, morceaux d’une chose possible » / jusqu’au 5 mai / Musée Fabre, Montpellier.

Originaire du Gard, où il est né en 1935, Toni Grand – qui a vécu principalement dans le sud-est de la France – a commencé à fabriquer des objets en bois et en fer durant son adolescence. À partir des années 1960, il a développé une activité artistique comme sculpteur. Suspendue entre l’abstrait et le figuratif, tendue vers l’épure, sa pratique témoigne d’une grande exigence esthétique, souvent innovante. Cultivant des liens étroits avec la nature, elle révèle en outre une importante dimension organique, de la conception à la représentation. Rien n’y semble figé, inanimé, enfermé.

Très bienvenue, l’exposition présentée par le Musée Fabre, à ­Montpellier, donne l’occasion de découvrir ou de redécouvrir un artiste largement reconnu de son vivant mais un peu oublié depuis sa mort en 2005. Intitulée « Toni Grand, morceaux d’une chose possible », elle regroupe près de soixante-dix œuvres. S’inscrivant dans une scénographie fluide, au déroulé chronologique, l’ensemble se distribue en quatre parties qui mettent en exergue les aspects essentiels de son travail.

Organique et synthétique

La visite démarre en beauté avec une série de splendides sculptures en bois, aux lignes ondulantes et frémissantes de poésie, certaines légèrement rehaussées de couleurs – le bois ayant été le seul matériau utilisé par Toni Grand entre 1967 et 1975. Plus tard, il usera d’autres matériaux (métal, résine, polyester, pierre…) et, plus atypique, incorporera aussi des éléments animaux (poisson, os de cheval, squelette bovin…). À partir de la fin des années 1970 vont ainsi apparaître de saisissantes œuvres hybrides, visibles dans la deuxième moitié de l’exposition. À la fois organiques et synthétiques, toujours rigoureusement composées, elles jouent parfois avec des figures géométriques.

Toni Grand a cherché à élaguer au maximum, à offrir à son art un espace le plus ouvert possible.

Dans sa dernière période, l’artiste a renoué avec le bois tout en recourant à des outils ou objets industriels. De ce nouveau processus d’assemblage a résulté par exemple Genie Superlift Advantage (1999), pièce emblématique qui consiste en un amas de bois sculpté peint en blanc s’élevant sur un monte-charge. En dialogue avec les sculptures, plusieurs œuvres sur papier, datant de 1970-1971, s’insinuent sur les murs tout au long du parcours.

Quel que soit le mode d’expression, Toni Grand a cherché à élaguer au maximum, à offrir à son art un espace le plus ouvert possible – sans cadre ni socle, au sens propre comme figuré. Ses œuvres ne s’imposent pas, même les plus volumineuses. Elles se (dé)posent simplement, délicatement, avec une singulière évidence, comme si elles avaient toujours été là, déstabilisant en douceur la perception et stimulant l’imagination.

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Exposition
Temps de lecture : 2 minutes