La honte d’un pays qui laisse ses enfants à la rue
À l’aube de la rentrée 2025, ce sont 2 159 enfants, dont 503 de moins de 3 ans, qui sont restés sans solution d’hébergement à la suite de leur demande au 115, selon les chiffres FAS-Unicef. Une situation dramatique que dénonce la députée LFI du Rhône Anaïs Belouassa-Cherifi.

Chaque année, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) et l’Unicef publient le baromètre des enfants à la rue. Un recensement du nombre d’enfants qui n’ont pas accès aux dispositifs d’hébergement d’urgence, pour souligner l’insuffisance de l’action de l’État, ou plutôt, dans le cas présent, souligner son inaction (1).
En cette rentrée 2025, 2 159 enfants (contre 2 043 en 2024) se sont vu refuser l’accès à l’hébergement d’urgence et se sont retrouvés à la rue. Pour ceux qui avaient la chance d’être scolarisés, ils sortaient de l’école sans autre destination que la rue. Des enfants sans toit, sans foyer, souvent sans repas ni possibilité de se laver. Qui s’abritaient comme ils le pouvaient : du froid, quand il fait -5 °C à Lille en hiver, ou de la chaleur, quand les canicules laissent des nuits étouffantes à 25 °C à Marseille.
Ces chiffres sont dramatiques, d’autant plus qu’ils ne cessent d’augmenter.
Parmi eux, 503 (contre 467 en 2024) avaient moins de trois ans. L’instabilité, la précarité et la menace constante que représente le fait de dormir dehors constituaient alors les premiers traumatismes de leur existence. Ces enfants sont restés sans solution d’accueil, et ce, malgré une demande d’hébergement d’urgence au 115. Ces chiffres sont dramatiques, d’autant plus qu’ils ne cessent d’augmenter. Tout comme ceux du sans-abrisme : 350 000 personnes en 2024. Et comme le chiffre du nombre de morts à la rue : 855 décès en 2024, dont 19 enfants de moins de 4 ans.
Cette situation n’est pas le fruit du hasard, mais le résultat de politiques destructrices menées depuis des années par différents gouvernements. La dégradation des conditions d’accès et de maintien dans le logement découle directement d’une paupérisation progressive des classes populaires. En 2024, 11,2 millions de personnes étaient en situation de pauvreté monétaire en France, un chiffre qui a quasiment doublé depuis 2017, année de l’élection d’Emmanuel Macron.
D’un côté, le logement occupe une part de plus en plus écrasante dans le budget des ménages, absorbant parfois plus de la moitié des revenus pour les plus modestes ; de l’autre, le travail n’est plus assez rémunérateur pour permettre de vivre dignement, avec des salaires qui stagnent tandis que les prix continuent de flamber.
Cataclysme social
Le néolibéralisme, qui réduit le logement à une marchandise comme une autre, est un cataclysme social. Les aides à la construction ont été diminuées, les aides au logement également, des milliards d’euros sont ponctionnés aux bailleurs sociaux, l’encadrement des loyers en zones tendues à été rendu inopérant et les prix des logements privés explosent tandis que le pouvoir d’achat des Français s’atrophie. Le marché est incapable de garantir à toutes et tous un logement décent et abordable.
Le macronisme, toujours au service des propriétaires, a considérablement fragilisé les locataires avec la loi Kasbarian/Berger.
Les chiffres du sans-abrisme et du mal-logement nous en offrent la preuve, s’il en fallait une. 3,5 % des propriétaires concentrent la moitié des appartements à louer. Ce système ne profite qu’à une petite caste spéculatrice, dont l’unique objectif est de s’enrichir sur la vie des autres, sans considération pour la précarité, la souffrance ou les décès qu’il engendre. Le macronisme, toujours au service des propriétaires, a considérablement fragilisé les locataires avec la loi Kasbarian/Berger.
Une loi anti-locataires, anti-pauvres, qui criminalise et stigmatise celles et ceux en situation d’impayés. Or, ces impayés ne relèvent pas d’un choix, mais sont la conséquence directe de salaires trop faibles, de la flambée des prix et d’une crise sociale qui s’aggrave. En s’attaquant aux plus précaires plutôt qu’aux véritables responsables de la crise du logement, Emmanuel Macron confirme son rôle d’ennemi des classes populaires.
Un pays ne peut se revendiquer défenseur des droits humains sans garantir le plus élémentaire d’entre eux, condition préalable à tous les autres : le droit au logement. En ce jour de publication des chiffres du nombre d’enfants à la rue pour la rentrée 2025, il est impossible d’être optimiste quant aux résultats.
Un an s’est écoulé, un an d’inaction de plus, un an d’inaction de trop.
Les solutions existent
Pourtant, les solutions existent. Face aux 2,7 millions de demandeurs de logements sociaux recensés mi-2024, il faut engager une construction massive de logements sociaux. Il est urgent d’encadrer réellement les loyers grâce à un dispositif protecteur pour les locataires, permettant une baisse progressive des prix. Le droit au logement opposable doit être enfin rendu effectif. Le nombre de places en hébergement d’urgence doit être augmenté immédiatement et massivement. La loi Kasbarian-Berger, qui facilite l’expulsion des locataires, doit être abrogée. Enfin, tous les logements doivent être accessibles aux personnes en situation de handicap, quel que soit leur handicap.
Notre humanité nous oblige à agir.
Les insoumis·es ont été de tous les combats sur la question du logement. Il est temps de tourner la funeste page du macronisme. Puisqu’elle se dresse contre 8 ans d’injustice et de macronisme, la mobilisation populaire du 10 septembre est un devoir envers ceux qui n’ont pas de toit. Notre humanité nous oblige à agir, à tout mettre en œuvre pour construire un avenir meilleur, en rupture avec le capitalisme et les logiques spéculatives qui ne produisent que du malheur. Nous sommes prêts à tout changer.
Des contributions pour alimenter le débat, au sein de la gauche ou plus largement, et pour donner de l’écho à des mobilisations. Ces textes ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction.
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