10 septembre : révolutionnons le soin, la Palestine est notre boussole
Dans une tribune, l’Assemblée pour des soins antiracistes et populaires veut remettre l’égalité des vies humaines au cœur du soin, appelant à le transformer dans le sillage du 10 septembre.

© Maxime Sirvins
Le 10 septembre prochain, une mobilisation massive nationale est annoncée. Elle est la réponse spontanée à l’annonce du plan d’économie du gouvernement Bayrou incluant notamment une coupe massive de 44 milliards dans les dépenses sociales et de santé. Mais pas que !
Cette mobilisation s’inscrit dans un contexte français plus large de déni démocratique répété (49.3 à répétition, dissolution de l’Assemblée nationale) en parallèle de nombreuses mobilisations passées massives non entendues et réprimées (passage en force de la loi Duplomb, gilets jaunes, retraites, mobilisation contre la vie chère aux Antilles, lutte pour l’indépendance en Kanaky).
L’État nous dit qu’il n’y a plus d’argent, mais qui décide de financer une course absurde à l’armement, en doublant le budget de la défense en moins de 10 ans, pendant que les institutions publiques s’effondrent ? Qui a voté la loi Duplomb mettant en danger les travailleur·ses, les habitant·es, les écosystèmes et l’humanité entière ? Qui décide du déremboursement des médicaments, de la révision de l’ALD (affection de longue durée), impactant la capacité des groupes les plus précaires à se soigner, entraînant des prises en charges retardées, des pathologies aggravées et avec des moyens toujours plus restreints ?
Qui s’attaque à l’Aide médicale d’État (AME) et aux conditions de vie des personnes n’ayant pas de papiers français ? Qui impose aux soignant·e·s d’essayer tant bien que mal de soulager des individus malades de leurs conditions d’existences dégradées ?
Le temps est venu de se réapproprier nos manières de soigner et de réinventer un système de santé plus juste pour tous·tes.
Système de santé plus juste
Toutes ces mesures devraient sonner comme des alarmes à nos oreilles : notre système de santé est directement victime de la dérive raciste, écocidaire et autoritaire de l’État français dans un contexte de montée du fascisme.
La politique d’austérité et le démantèlement orchestré des institutions publiques impactent directement nos conditions de travail et la manière dont nous accompagnons les patient·es. Nous, travailleur·ses de la santé, devons nous mobiliser et lutter pour davantage d’autonomie sur nos lieux de travail. Le temps est venu de se réapproprier nos manières de soigner et de réinventer un système de santé plus juste pour tous·tes.
Si notre travail a réellement pour objectif de préserver la vie, il doit nécessairement se penser selon une approche décoloniale, anti-impérialiste et anticapitaliste de la santé, afin de lutter contre les crises démocratiques, sociales et écologiques auxquelles nous faisons face.
Fort·es de la connaissance de ces enjeux, c’est donc avec enthousiasme que nous accueillons l’appel des syndicats de l’AP-HP (CGT, FO, CFDT et UNSA) à organiser des assemblées générales ouvertes à tous·tes afin de préparer une grève unie contre le plan d’économie du gouvernement qui viendrait fragiliser un système public de santé déjà sous pression.
Nous nous devons d’y être, les directions syndicales ne s’organiseront pas sans nous. Les syndicats sont des tremplins pour faciliter l’organisation des travailleur·ses sur nos lieux de travail. Nous sommes persuadé·e·s qu’il est indispensable d’y participer et d’y aborder la question du racisme et de la Palestine. Tout d’abord, parce que la gravité de la situation nous y oblige.
Se taire, c’est être complice de la silenciation des atrocités subies par le peuple palestinien et de tous les peuples subissant l’oppression impérialiste dont la France est complice. Se désolidariser du peuple palestinien, ne pas dénoncer ce génocide et l’état d’apartheid, c’est participer à l’idée d’une hiérarchisation des vies.
Nous devons nous mobiliser pour la Palestine car cette lutte soulève les mêmes questions ici en France. : toutes les vies se valent-elles ?
Lois racistes
Ne pas agir, ou même juste réagir, c’est diminuer la valeur même de la vie et construire un avenir où les souffrances d’autrui résonnent moins en nous, où la violence devient plus acceptable, voire souhaitable. Par la Palestine, ce sont les valeurs de résistance, d’empathie et de solidarité, qui forgent notre humanité, qui sont remises en jeu.
Quel soin serait alors possible dans un monde privé de ces valeurs ?
Nous devons nous mobiliser pour la Palestine car cette lutte soulève les mêmes questions ici en France. : toutes les vies se valent-elles ?
Notre gouvernement, par ses décisions politiques, répond à cette question : non, pour lui, toutes les vies ne se valent pas. La loi Darmanin, les attaques contre l’AME, les rafles de Retailleau, empêchent concrètement des groupes entiers d’accéder aux soins nécessaires. Il n’est plus possible d’imaginer que la question de la santé n’est pas le fruit de décisions politiques.
Ces lois racistes impactent directement la manière dont nous pratiquons nos métiers. Ne rien dire c’est accepter de servir ces projets visant à privilégier certaines vies plutôt que d’autres. Allons-nous les laisser choisir qui doit vivre et qui doit mourir, qui doit être soigné·e et qui ne le doit pas ?
Allez rencontrer vos syndicats, collectifs proches de chez vous, vos associations, ou encore vos élus locaux. Saisissez-vous en pour créer des actions de blocage ou mobilisations autour de chez vous ! Et le 10 septembre, portons ensemble haut et fort ces revendications : « Fin du monde, fin du mois, libération de la Palestine : même combat ! »
Que ce 10 septembre soit pour nous, travailleur·ses du soin, une lutte pour la sauvegarde de la dignité de toutes les personnes : travailleur·ses du soin ou non ! Luttons contre cet État qui nous maltraite ! Construisons ensemble les conditions de possibilité d’une révolution du soin.
Des contributions pour alimenter le débat, au sein de la gauche ou plus largement, et pour donner de l’écho à des mobilisations. Ces textes ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction.
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