D’Angelo, ange déchu
Le chanteur multi-instrumentiste américain est décédé. Retour en quelques mots sur une carrière brillante et tourmentée.
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Le 14 octobre, le décès de D’Angelo a sonné le glas de plus de dix ans d’attente. Dix ans que ses admirateurs cultivaient l’espoir d’un retour, après la parution en 2014 d’un disque, Black Messiah, publié quatorze ans après son précédent. Carrière fulgurante puis chaotique, D’Angelo avait été porté aux nues en 1995 avec son premier album, Brown Sugar.
Il a alors 21 ans et, dans sa trajectoire, déjà, s’entrechoquent spiritualité – il est fils de pasteur – et tumultes d’une vie profane dans les quartiers défavorisés de Richmond en Virginie. Le disque s’impose comme un album de soul qui regarde vers le hip-hop et les déconstructions rythmiques.
D’Angelo cultive cette réputation de chaînon ultime entre funk, soul et rap.
Par la suite, D’Angelo cultive cette réputation de chaînon ultime entre funk, soul et rap. En 2000, avec Voodoo, il est considéré comme le chef de file d’une génération d’artistes africains-américains (Erykah Badu, Jill Scott, Bilal, etc.), héritiers de Sly Stone ou d’ Aretha Franklin, mais nés dans le contexte urbain des années 1970-1980.
Le 12 juillet 2000, le Voodoo Tour s’était posé à Paris, au Grand Rex. Revue funk, le concert marque à jamais les quelques chanceux qui y assistent. D’Angelo y est accompagné, entre autres, du bassiste Pino Palladino et du batteur Questlove, complice de toujours.
Sur scène, il fait virevolter son falsetto rocailleux, orchestre un dialogue entre claviers et cuivres, et bombe son torse musclé. D’Angelo est au sommet, mais la chute sera rude. Alors que les concerts s’enchaînent, les retards intempestifs pointent leur nez. Le musicien supporte mal la célébrité, son image de sex-symbol. Il rentre aux États-Unis et s’enferme chez lui.
Dialogue avec l’époque
À partir de 2002, les collaborateurs de D’Angelo ne cesseront de devoir donner de ses nouvelles. Où est-il ? Qu’est-il devenu ? Erykah Badu l’ignore, Questlove le sait, mais garde le secret. Finalement, D’Angelo envoie ce qui restera son dernier disque à Prince. C’est lui qui le pousse à le sortir, à se lancer pour la dernière fois. Black Messiah est l’album le plus disparate mais aussi le plus politique de D’Angelo, une démonstration de sa capacité à dialoguer avec son époque, malgré la dépression et les addictions.
Entre 2012 et 2013, le musicien remonte sur scène, s’entoure des grands guitaristes Jef Lee Johnson et Jesse Johnson, puis disparaît de nouveau. Quelques cartes postales suivront : un hommage à Prince en 2016, un morceau pour le jeu vidéo Red Dead Redemption 2, des rumeurs, jusqu’à ce que la maladie ne le fige.
Pour aller plus loin…
 
			« Bhelize don’t cry », chants de bataille
 
			« Unplugged (20th anniversary) » d’Alicia Keys : simple et soul
 
			« Sametou Sawtan », souffle au cœur
 
			 
							

 
								 
								 
									 
									 
									