« Il y a une histoire avant la Flottille, il y en aura une après »
À l’aéroport de Paris-Orly, la délégation française de la Global Sumud Flotilla a été accueillie mardi 7 octobre en grande pompe par un parterre de soutiens et de journalistes, après avoir passé 3 jours en détention en Israël.

© Maxime Sirvins
Orly sous le soleil. Entre les voyageurs aux valises chargées, deux compagnies de CRS déboulent. Ce déploiement n’est pas banal, même dans le deuxième aéroport du pays. Pour cause, à 14 heures est prévue l’arrivée de la délégation française de la Global Sumud Flotilla, en provenance d’Athènes.
Les membres de l’initiative ont tenté de briser le blocus humanitaire illégal mis en place par Israël autour de la bande de Gaza. Dans la nuit du 2 au 3 octobre, ils ont été enlevés dans les eaux internationales par l’armée israélienne. Florence Ait-Salah-Lecervoisier, conseillère municipale LFI à Orly, est venue accueillir ses camarades avec une envie de résistance pacifique : « Si on me propose d’y aller, je lâche tout et j’embarque. »
Devant les portes battantes grises du hall d’arrivée du terminal 2, la foule de soutiens grossit. La Confédération générale du travail (CGT) est également présente. Pour la première fois depuis le 7-Octobre, un syndicat national français est représenté dans une traversée humanitaire vers le territoire palestinien. C’est Cédric Caubère, responsable CGT de Haute-Garonne, qui a embarqué pour le compte de l’organisation.
Sandrine Mourey, membre du bureau confédéral du syndicat, déclare avec fierté que « la flottille a montré une union de l’ensemble des peuples ». Alors que les drapeaux syndicaux et palestiniens se déploient, le parterre de militants et de journalistes est amassé derrière une bande noire « No entry » au sol.
« L’opération est un succès »
À chaque battement des portes grises, tous se concentrent pour apercevoir la zone de débarquement. Enfin, le politologue Thomas Guénolé, qui avait embarqué sur la flottille, passe sa tête à travers l’encadrement d’une porte, « on arrive, on récupère les bagages ».
Quarante minutes viennent de passer depuis l’atterrissage de l’avion, et les 28 ressortissants français, quasiment tous encore habillés d’un pull et d’un jogging gris, sortent enfin. Certains arborent « Free Palestine » griffonné au marqueur noir sur leur tenue, donnée lors de leur détention. Trois jours dans les geôles du régime de Tel-Aviv n’ont pas écorné leur motivation.
On a eu un tout petit aperçu de ce que les Palestiniens vivent dans les geôles israéliennes.
R. Hassan
L’heure est aux retrouvailles. Cédric Caubère souligne qu’ils ont été enlevés dans les eaux internationales et traités comme des « migrants entrés illégalement en Israël et soumis à une déportation », selon les termes juridiques israéliens. Pour Waves of Freedom, organisme chapeautant la délégation française, « l’opération est un succès ». Jamais une flottille n’a été aussi proche des côtes de Gaza, ils affirment également que ce n’est qu’une « première page » de l’épopée de la flottille.
« Des actes de tortures physique et morale »
Les militant·es accusent également la police de l’État hébreu, d’actes de violences physiques et de mauvais traitement. « On a eu un tout petit aperçu de ce que les Palestiniens vivent dans les geôles israéliennes », déclare l’eurodéputée LFI Rima Hassan, devant les caméras avant de quitter l’aéroport accompagnée par ses collègues députés et eurodéputées insoumis, Emma Fourreau, Marie Mesmeur et François Piquemal. Eux aussi membres de l’initiative.
Pour l’avocate de Waves of Freedom, Lyna Al Tabal Peron, qui a aussi embarqué, les membres de la flottille ont subi des « actes de tortures physique et morale ». Elle évoque avoir été enfermée dans une « cage de 12 mètres carrés pour 57 femmes sous le soleil ». Des conditions de détention similaires à Guantánamo ou chez Daesh, selon ses dires. Elle affirme que la police israélienne ne s’est pas privée de frapper les militant·es à bord les plus vocaux lorsqu’ils et elles exprimaient des messages de soutien à la Palestine.
Aux alentours de 4 heures du matin, c’est le ministre d’extrême droite Itamar Ben-Gvir qui est venu haranguer les militant·es devant les caméras. « Une humiliation » pour Yacine Hannaf, médecin de formation et président de la délégation. Toujours à l’intérieur du terminal, il est au milieu de la foule et profite d’un moment chaleureux avec ses proches et soutiens.
À la main, il garde « un cadeau de la prison du Néguev ». Un petit sachet en plastique gris avec des caractères hébreux bleus contenant les quelques affaires qu’on lui a rendues. Brahim Marzouk, coordinateur de la flottille se félicite de l’initiative : « Il y a une histoire avant la Flottille, il y aura une histoire après la Flottille. » C’est avec l’espoir qu’une nouvelle flottille brise le blocus que les militant·es rentrent chez eux. Mais les huit navires de la Freedom Flotilla Coalition et de la Thousand Madleens to Gaza ont été interceptés le 8 octobre.
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