Philharmonie de Paris : le contenu des deux plaintes pour violence volontaire
Lors de l’action contre la tenue du concert de l’Orchestre philharmonique d’Israël à la Philharmonie de Paris, jeudi 6 novembre, deux militants propalestiniens se sont violemment faits frapper. Blessés, ils ont porté plainte pour violence volontaire.

© Arthur Weidmann / CC BY-SA 3.0 / Wikipédia
Les vidéos ont fait le tour des plateaux télés et des réseaux sociaux. Jeudi 6 novembre, plusieurs militants de Palestine Action France ont pacifiquement interrompu le concert de l’Orchestre philharmonique d’Israël, qui se tenait sous haute tension à la Philharmonie de Paris. Fumigènes à la main, on voit deux d’entre eux se faire très violemment frapper par des spectateurs.
Depuis, les commentaires vont bon train à l’égard de ces militants qui dénoncent le génocide en cours dans la bande de Gaza par Israël. Laurent Nuñez, le ministre de l’Intérieur, comme Rachida Dati, ministre de la Culture, sont notamment intervenus dans le débat pour « condamner fermement » cette action que « rien ne justifie », sans jamais évoquer les violences qui ont suivi.
Très rapidement, les quatre militants suspectés d’y avoir pris part sont placés en garde à vue pendant 48 heures puis mis en examen ce dimanche. En revanche, les commentaires sont bien moins nombreux concernant les spectateurs qu’on les voit lyncher, sur les vidéos publiées sur les réseaux sociaux. Ainsi, deux d’entre eux ont décidé de porter plainte pour violences volontaires ce samedi 8 novembre.
Crâne ensanglanté
Dans ces plaintes, que Politis s’est procurées, on peut lire que « Monsieur M. a fait l’objet de nombreuses violences par des personnes s’apparentant à des spectateurs ». On apprend aussi que le militant, qui ne porte aucun coup sur les vidéos que l’on peut voir, « a eu le crâne ensanglanté et des contusions multiples ». « Des spectateurs » se sont « acharnés », poursuit la plainte. « On lui a aussi craché dessus plusieurs fois », explique son avocat, Mohamed Jaite.
Même constat pour l’autre plaignante, sérieusement blessée à la suite des violences subies. « Madame E. a subi des violences sévères sur le crâne par des personnes s’apparentant à des spectateurs au sein de la Philharmonie. Ces violences ont eu des conséquences graves. En effet, durant sa garde à vue, elle a eu des vertiges ainsi que des nausées, ce qui a justifié son transport immédiat à l’hôpital », est-il écrit dans la plainte transmise au parquet de Paris.
Les faits sont très choquants. On a vu la sauvagerie de quelques-uns s’abattre et se déployer de manière primaire.
M. Jaite
Ces deux plaintes mettent surtout en avant des publications sur les réseaux sociaux qui revendiquent ces violences. Comme celle de Gabriel Farhi, un rabbin qui assume avoir « levé la main » sur la militante hospitalisée. « Cela aurait dû être un concert sous haute protection. Zéro. Parvenir à faire entrer des fumigènes ne se fait qu’avec des complicités. Quant à la jeune femme sur qui j’ai levé la main, je ne m’excuse pas », écrit-il dès jeudi soir, après le concert.
Un autre internaute, sous le pseudonyme SD, se félicite dans une publication d’avoir « molesté l’homme aux fumigènes ». « Si le procureur me le demande, je serai heureux de lui expliquer pourquoi j’ai contribué à cogner ce dangereux connard », assume-t-il, toujours sur X.
« Violence inacceptable »
« Les faits sont très choquants. On a vu la sauvagerie de quelques-uns s’abattre et se déployer de manière primaire », s’indigne Mohamed Jaite. Celui-ci accuse notamment l’exécutif, via les prises de position des ministres de l’Intérieur et de la Culture, de « prendre parti pour les violences exercées dans le cadre de cette action ». « Les seules violences, physiques comme verbales, qui ont été commises au cours de cette action l’ont été de la part de certains spectateurs », note-t-il.
« Il était d’un devoir moral de tout mettre en œuvre pour empêcher la tenue de ce concert. Notre action était entièrement pacifique. La réponse a été d’une violence inacceptable : un militant a été lynché dans la salle, le visage ensanglanté sous les coups de plusieurs spectateurs, devant une sécurité complice et passive », abonde le collectif Palestine Action France dans un communiqué.
Malgré ces plaintes, les vidéos explicites les accompagnant et même les revendications de ces actes sur les réseaux sociaux, Mohamed Jaite explique n’avoir aucune connaissance de l’ouverture d’une éventuelle procédure. « Je ne suis pas certain que le parquet bouge, compte tenu du lien hiérarchique qu’il a avec l’exécutif, confie-t-il, mais on va tout faire pour que ce soit le cas. » Contacté par Politis, le parquet n’a pas répondu à notre sollicitation à l’heure où nous publions ces lignes.
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