Pas de trêve pour les réformes

Thierry Brun  • 29 décembre 2007
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Pas de trêve des confiseurs pour les réformes des retraites et du marché du travail. Et surtout pas de négociations tapageuses. Dans le cadre de « l’agenda social 2008 », François Fillon a adressé le 26 décembre aux organisations syndicales une lettre « dans laquelle il leur demande de négocier sur deux thèmes supplémentaires : le financement des organisations syndicales et professionnelles et la question du temps de travail. Les partenaires sociaux devront rendre leurs conclusions avant le 31 mars 2008 ». Mais dans la foulée, il présente un complément au document d’orientation sur la « démocratie sociale » qui remet en question le temps de travail. Et c’est dans la précipitation que le gouvernement tente de régler le dossier des régimes spéciaux de retraite avant même que les négociations soient terminées.

Le Premier ministre a accompagné sa lettre d’un document d’orientation dont le contenu « reprend intégralement une exigence du patronat », qui est considérée par l’Union syndicale Solidaires comme « une remise en cause de la durée légale du travail ». « Il envisage que le temps de travail puisse être fixé entreprise par entreprise, voire de gré à gré entre le salarié et l’employeur. Il s’agirait de fixer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires et les taux de majoration applicables. Remarquons tout d’abord que cette éventualité aurait pour conséquence de vider de tout contenu la récente loi sur les heures supplémentaires, puisqu’elle aboutirait à ne plus considérer les heures travaillées au-delà de 35 heures comme des heures supplémentaires
qui ne seraient donc plus défiscalisées. Le « travailler plus pour gagner plus » se transforme en « travailler plus gratuitement » ».

D’autre part, les syndicats ont pris connaissance le 26 décembre des projets de décrets réformant les régimes spéciaux de retraite, « qui seront promulgués dans la première quinzaine de janvier, après avoir été transmis, pour avis, auprès des Caisses de retraite des entreprises concernées (SNCF, RATP [^2], IEG – Entreprises des Industries Electriques et Gazières », selon FO. La CGT et Solidaires ont reproché au gouvernement de faire fi du dialogue social et d' »anticiper » une hausse de la durée de cotisation à 41 annuités pour le public et le privé.

En effet, le gouvernement de François Fillon tient pour acquis un allongement progressif de la durée de cotisation à 41 ans après 2008, confirmant ainsi que la réforme des régimes spéciaux va de pair avec le processus d’allongement de la durée de cotisation pour l’ensemble des salariés. Les salariés du privé sont d’ores et déjà averti qu’ils devront cotiser plus pour leur pension, alors que les négociations n’ont pas encore commencé, la loi de 2003 prévoyant une négociation sur les retraites du régime général en 2008.

FO « conteste avec vigueur les dispositions incluses dans les projets de décrets concernant le passage progressif à partir de 2013 à 41 ans de cotisations à raison d’un trimestre au 1er juillet de chaque année ». Dans un communiqué commun, SUD-Rail et FO estiment que « le texte du projet de décret va au-delà des mesures annoncées et combattues par les cheminots, notamment les 4 points clefs de la contre-réforme, à savoir l’allongement de la durée de cotisation à 40 ans, la décote, l’indexation sur les prix et le double statut, puisqu’il impose l’allongement automatique de la durée de cotisation à 41 années ».

Les fédérations SUD-Rail et FO ont proposé à toutes les fédérations de cheminots « de se retrouver en une nouvelle interfédérale le 8 janvier 2008, afin d’envisager une action commune contre la promulgation de ce décret de régressions sociales ».

Manifestement, à quelques mois des élections municipales et cantonales, François Fillon montre le peu de cas qu’il fait du dialogue social et est tenté par le passage en force sur les dossiers sensibles du temps de travail et des retraites.

[^2]: Le projet de décret relatif au régime spécial de retraite du personnel de la RATP sera présenté pour avis au conseil d’administration de la caisse de retraite le 7 janvier 2008. On peut le consulter sur le site de SUD-RATP (http://www.sudratp.fr). Selon ce syndicat, « le décret anticipe l’augmentation progressive des durées de cotisation au-delà de 2012, où la passage à 40 annuités sera effectif, jusqu’à l’horizon 2024, au rythme d’un trimestre supplémentaire par an, soit 40 annuités en 2012 ; 41 annuités en 2016 ; 42 annuités en 2020 et vraisemblablement 43 annuités en 2024 ».

Temps de lecture : 4 minutes
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