Sauve qui peut, les banques françaises…

Une fois de plus, lundi a été une journée noire pour les banques françaises du CAC 40. BNP Paribas, la Société générale et le Crédit agricole ont encore chuté à la Bourse. Les banques françaises ont perdu la moitié de leur valeur en Bourse. Mais pas seulement. Petite explication avec quelques chiffres vertigineux sur les hors bilan de ces fleurons bancaires.

Thierry Brun  • 12 décembre 2011
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Sauve qui peut, les banques françaises…
Photo : AFP / Spencer Platt / Getty images north amercia

Les plus grandes banques françaises, BNP Paribas, la Société générale et le Crédit agricole vont-elles réclamer une recapitalisation d’urgence, comme après la crise financière de 2007-2008 ? Dans le secret des marchés se profilent en tout cas un avenir très tourmenté pour les fleurons du secteur bancaire.

On le sait, les banques ne se font plus confiances et la récente dégradation de la notation financière des banques françaises par l’agence Moody’s multiplie les doutes sur la solidité de ces établissements bancaires. Déjà le 30 novembre, Standard & Poor’s en avait rajouté une louche en réduisant la note de 15 groupes bancaires européens et américains, dont BNP Paribas et la Société générale.

Signe que cela va mal, les trois fleurons bancaires multiplient les plans de réduction d’effectifs, y compris dans certaines activités de trading, ainsi que dans la vente d’activités pour dégager du cash et renforcer leur solvabilité. « L’Autorité bancaire européenne a allégé leurs contraintes en fonds propres, quand plusieurs de leurs concurrentes voyaient leurs charges augmenter ou rester stables » , peut-on lire sur le site d’ Investir .

Les banques françaises ont un autre problème : les investisseurs étrangers retirent massivement leurs dépôts à court terme. Les banques ont ainsi perdu près de 100 milliards de dépôts en septembre, selon des données de la Banque de France. Cette fuite des investisseurs n’a pour la première fois pas été compensés par d’autres entrées, souligne Les Echos.

Les banques françaises sont aussi très dépendantes des financements de marché. Le journal des finances Investir cite les dernières statistiques de Bloomberg pour expliquer que « les fonds monétaires américains ont encore coupé leur exposition aux banques de l’Hexagone de 68 % en novembre, la ramenant à 5,56 milliards de dollars. Les réserves de liquidité des banques françaises se sont ainsi réduites de juin-juillet à la fin septembre (- 20 milliards pour Crédit Agricole, – 22 milliards pour BNP Paribas). Dans le cas de la Banque Verte, ce stock ne couvre qu’une part des besoins de financement à très court terme » .

Reste un problème majeur pour les banques françaises : Les montants des sommes précisées en hors bilan, c’est-à-dire les opérations qui n’apparaissent pas dans le bilan des banques, sont faramineux, et peuvent dans certains cas mettre en péril leur solvabilité. Prenons un exemple : le bilan total de BNP Paribas au 30 juin est de 1 926 milliards d’euros, à comparer avec l’endettement public de la France, qui est d’environ 1 600 milliards d’euros fin 2010. Cet indicateur classique de puissance d’une banque révèle ainsi sa capacité à mobiliser des ressources pour les affecter à des emplois déterminés.

Mais c’est sans compter sur le hors bilan de cette banque, là où sont logés les contrats de produits financiers dérivés comme les CDS souscrits pour les dettes des Etats, pour la plupart conclus de gré à gré. Le montant total hors bilan cumulé par BNP Paribas est de 577 milliards d’euros au 31 décembre 2010 et a grimpé quasiment de 100 milliards par rapport à 2009.

Le risque d’exposition des banques françaises résultant de leurs engagements hors bilan est supérieur au PIB français : en juillet 2010, il était de 929 milliards d’euros pour le Crédit agricole, de 491 milliards pour BPCE et de 453 milliards pour la Société générale.

En vérité, les banques du CAC 40 sont des colosses par rapport aux Etats européens, mais des colosses aux pieds d’argile. BNP Paribas, la Société générale, le Crédit agricole et BPCE font partie des 29 grandes banques à dimension systémique (sur 46 000 dans le monde), recensées par le Conseil de stabilité financière (CSF) que le sommet du G20 à Cannes a évoqué pour le première fois. En clair, leur puissance est telle que la chute de l’une d’entres elles, à l’instar de Lehman Brothers en 2008, peut causer un cataclysme mondial.

L’un des principaux problèmes de la crise actuelle, c’est qu’on ne connaît pas précisément l’exposition des banques à cause des ces produits dérivés et notamment des CDS. Et cela crée une incertitude extrêmement grande sur la solidité de ces acteurs du marché financier. Il serait temps de créer un pôle financier public et de mettre fin à ces mastodontes de la finance casino.

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