Surprenante simulation d’accident le 18 décembre à la centrale nucléaire de Dampierre en Burly

Claude-Marie Vadrot  • 16 décembre 2012
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Mardi 18 décembre, la déjà bien vieille centrale de Dampierre en Burly sera l’objet, explique EDF, d’un « exercice grandeur nature » pour un accident nucléaire. Tellement « grandeur nature » que les autorités expliquent à l’avance que cette simulation basée sur d’importants rejets d’éléments radioactifs dans l’atmosphère ne concernera que… 340 personnes habitant dans un rayon de…deux kilomètres. L’exercice évitera soigneusement la petite ville de Dampierre en Burly, toute proche, qui en compte 1400. Tout comme la commune de Nevoy et ses 1200 résidents et celle de Gien, 15 000 personnes. Ces deux agglomérations dont la zone urbaine comptent 24 000 habitants et sont toutes les deux à l’Ouest des quatre réacteurs de la centrale, c’est à dire dans la zone que la radioactivité toucherait en quelques minutes.

« Le pire est prévu, explique le directeur de la centrale à la presse locale, afin que l’entraînement apporte le maximum de solutions à un maximum de situations ». Déclaration qui relève de la désormais célèbre langue de bois, approuvée par les syndicats, pratiquée depuis des lustres par les responsables d’EDF. Lesquels, par exemple, n’ont toujours pas expliqué pourquoi et comment un salarié de la centrale a été contaminé le 29 novembre dernier.

Les responsables d’EDF, avec cet exercice pour lequel seulement une part négligeable des populations sera concerné, cherchent une nouvelle fois à persuader les habitants de la région qu’un éventuel accident aurait des conséquences limitées et que la radioactivité s’arrêtera sagement là où ils l’ont décidé. Ce qui ne correspond évidemment à aucune réalité météorologique. Tous les accidents ou incidents du passé, et pas seulement à Fukushima, à Three Miles Island et à Tchernobyl, ont amplement démontré trois choses. D’abord que le déroulement d’un accident est imprévisible dans son développement, ensuite que la radioactivité n’obéit pas aux prudences des prophètes du nucléaire et enfin que les rejets éventuels concernent aussi les cours d’eau qui refroidissent en permanence les réacteurs. C’est à dire la Loire pour Dampierre, Loire qui devrait notamment charrier elle aussi des éléments radioactifs vers Orléans sans qu’il soit possible de les arrêter. Dans ce cas d’école destiné à rassurer et à prouver que l’accident nucléaire n’est pas plus dangereux qu’un accident nucléaire n’est qu’un simple accident industriel, les responsables de la centrale et d’EDF, contribuent à banaliser le fonctionnement d’une centrale.

Quand la sirène de Dampierre se déclenchera mardi à 9 heures, les 340 habitants officiellement concernés seront prévenus par téléphone, ce qui serait impossible pour les 24 000 autres se trouvant dans le cône de dispersion de la radioactivité en cas d’accident réel. Les routes d’accès à la zone restreinte définie pas les autorités, seront barrées par les gendarmes. Lesquels, dans une réalité menaçante, ne seraient même pas équipés d’un matériel leur permettant d’échapper au danger. Quant aux autres, ils attendront le véritable accident pour savoir quoi faire. Ils pourront toujours s’occuper à chercher fébrilement les fameuses pastilles d’iode qui n’ont pas été distribuées depuis des années dans tout le canton. Ils pourront toujours appeler le 800 201 299 ou le 02 38 62 48 48 pour manifester leur mécontentement devant cette simulation dérisoire…

D’ailleurs, comme il ne faut pas effrayer les abonnés à EDF, les gendarmes ont reçu comme instructions de ne pas s’opposer à la circulation avec leurs barrages. Ils feront simplement de la figuration qui n’est pas intelligent. Alors que chacun sait qu’en cas d’accident, même limité, l’annonce de l’accident entraînerait instantanément un embouteillage monstre provoqué par les habitants pressés de fuir et d’aller récupérer leurs enfants dans les écoles. D’autant plus que les spécialistes de la cellule de crise installée à Fontenay aux Roses dans la banlieue parisienne, ne sont toujours pas d’accord sur la conduite à tenir : se calfeutrer dans les maisons ou fuir le plus rapidement possible en espérant échapper au nuage dangereux.

Il serait plus logique, pour EDF et surtout pour les habitants, de ne pas s’opposer plus longtemps à la fermeture de cette centrale vieillissante qui a été à plusieurs reprises rappelée à l’ordre pour ses manquements à la sécurité. Que celle ci concerne ses salariés ou les intérimaires de plus en plus nombreux.

Il serait plus honnête également qu’EDF renonce au chantage au chômage qui serait provoquée par la fermeture, alors que le démantèlement d’une telle installation donnera du travail aux ingénieurs, aux techniciens et aux ouvriers d’EDF pour au moins une quarantaine d’années….

{{Au fait, si comme les augures nucléaires l'affirment et le répètent, l'accident est impossible, pourquoi se donner du mal à faire semblant d'en simuler un ?}}
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