Hollande en forme …

… mais ni social, ni démocrate !

Bernard Langlois  • 14 janvier 2014
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1— J’ai déjà eu l’occasion de le dire sur ce blog : ceux qui, de droite ou de gauche, prennent François Hollande pour une andouille, un grand méchant mou, une sorte d’ectoplasme politique ont tout faux. Ce type est loin d’être un imbécile et sait très bien où il va et mène le pays qui l’a installé à sa tête. Du reste, devient-on président de la République avec un QI de débile et un caractère de mollusque ?


Illustration - Hollande en forme …


2— Le reproche que des gens de gauche peuvent en revanche lui faire, c’est qu’il n’est pas de gauche. Et cela aussi, nous le disons depuis le début de son mandat. Nous le savions déjà en votant pour lui (au second tour), car nous souhaitions alors éliminer Sarkozy. L’objectif fut atteint. La gauche n’est pas au pouvoir pour autant, et ne risque pas de l’être avant longtemps.

3— La conférence de presse de ce 14 janvier (la troisième du quinquennat) marque non pas un virage, comme beaucoup se plaisent à le dire, mais une continuation et une accentuation de la politique menée depuis 18 mois. D’ailleurs l’intéressé le reconnaît lui-même : « Dans un virage on ralentit [^2], moi j’accélère », a-t-il dit en substance en réponse à une question.

4— De même, je récuse l’appellation de « social-démocrate » dont se gargarisent aujourd’hui nombre de commentateurs (et que le chef de l’Etat s’attribue à lui-même). Ça aussi, je l’ai déjà écrit ici : historiquement, la social-démocratie était un courant politique où cohabitaient une aile révolutionnaire et une aile réformiste [^3] qui avaient un objectif commun, renverser le capitalisme et instaurer le socialisme. Les moyens de lutte différaient, le but restait le même.

5— Certes, au fil des ans, le terme de « social-démocratie » a perdu de sa vigueur. Il désigne au mieux cette sorte de régimes bâtards qu’on trouve en Allemagne ou dans les pays scandinaves, un poil plus sociaux que la moyenne mais bien loin de remettre en cause le système [^4]. Au pire, et pour rester dans l’histoire de France, le mot évoque la SFIO des années 50 et la gestion calamiteuse de Guy Mollet. En ce sens seulement on peut l’accoler à François Hollande (et ce n’est pas un compliment !).

6— On peut toutefois lui en faire un (de compliment) : sa conférence de presse a été formellement très bonne, maîtrisée, professionnelle. Il a confirmé sur le fond son allégeance sans faille au patronat et, au-delà, via l’Union européenne, au capitalisme financier international. Ceux qui pensaient le trouver en mauvaise posture (à cause d’une cote sondagière misérable) et déstabilisé par les récentes révélations concernant sa vie personnelle, en sont pour leurs frais. Ferme sur le fond de sa politique (de rigueur) inflexible sur sa vie privée et, comme libéré d’une situation intime un peu lourde à porter [^5] qu’il entend régler pour de bon avant son prochain voyage à Washington : vraisemblablement, Valérie n’en sera pas.

7— Pour le reste, c’est-à-dire l’essentiel, tout va mal, tout continuera d’aller mal, les crises s’ajoutent aux crises : économiques, sociales, politiques, écologiques … Et quoi qu’en disent tous les docteurs Pangloss de la terre, on se rapproche du mur en klaxonnant.

Au fait : bonne année à tous.

[^2]: Soit dit en passant, il vaut mieux ralentir avant que dans le virage ; heureusement pour lui il a des chauffeurs …

[^3]: Par exemple, le parti ouvrier social-démocrate russe, qui regroupait mencheviks et bolcheviks.

[^4]: Et j’emploie le mot « système » à dessein, car je considère qu’il n’est pas le monopole de Dieudonné ; c’est dans le même « système » politico-économique qui règne maintenant sur la quasi totalité de la planète qu’on peut distinguer des « régimes » vaguement différents, et c’est, au-delà des régimes, le système qu’il convient de combattre …

[^5]: Comme l’a noté Catherine Nay sur Europe 1 juste après l’ ite missa est

Pour les commentaires, vous connaissez la règle du jeu …

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Temps de lecture : 4 minutes
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