Crise de la viande:les mensonges et l’hyprocrisie de la grande distribution et des industriels de la viande !

Claude-Marie Vadrot  • 20 juillet 2015
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Il suffit d’arpenter les allées d’Auchan, d’Intermarché ou de Carrefour, comme je l’ai fait au cours des derniers jours, pour mesurer l’ampleur des mensonges de la grande distribution en ce qui concerne le « Made in France ». Dans tous les domaines, à commencer par celui de la viande. Non seulement, les grandes surfaces escroquent les agriculteurs (sauf les « usines à viande ou à lait » qui semblent jouir d’un « statut » protégé car entre industriels on fait attention) en écrasant les prix à leur seul profit, mais la syntaxe du « made in France » mérite le détour.

D’abord, dans les gondoles à viande étiquetées « origine française » vantées par le Président et les hypocrites responsables des chaines de super ou hyper marchés, il faut avoir un œil exercé (tout est écrit en corps 6…) pour remarquer que cette origine revendiquée s’appuie souvent sur la « préparation ». En vertu du principe, hélas légal, qui permet de « naturaliser » une viande ou tout autre produit importé en lui faisant subir une transformation en France, fut-elle légère. Qu’il s’agisse de la découpe, d’un complément de fumage ou de l’ajout d’un peu de sel ou de poivre. C’est de cette façon que le porc industriel de la Bretagne peut se transformer en « jambon de Bayonne », en « saucisson d’Auvergne » ou en « charcuterie corse » par le miracle d’une salaison ou d’une vague préparation dans une « usine » de la région de Bayonne, d’Auvergne ou de Corse. Et par miracle, les produits vendus se retrouvent affublés d’une Appellation d’Origine Protégée, qu’ils soient frais ou conditionnées. On retrouve souvent ces produits industriels sur les marchés en plein air sous le nom de « charcuterie artisanale ». J’y ai même aperçu du « Cochonou », cette marque qui sponsorise le tour de France avec des saucissons issus de la grande industrie…

Dans les gondoles de viande, sont artistement mélangés les morceaux effectivement produits en France et (constaté ce lundi matin) ceux qui arrivent de Grande-Bretagne, d’Allemagne, de Pologne, du Danemark et des Pays-Bas. Il faut avoir chaussé ses lunettes pour découvrir, toujours en caractères minuscules souvent en couleur sur une autre couleur, cette provenance plus ou moins lointaine qui se vend aux dépends des produits qui affichent une « origine » française que nul ne peut et ne veut contrôler. Surtout quand il s’agit d’animaux nés en France, envoyés à l’embouche en trains ou en camions dans les pays limitrophes ; avant de revenir sur pied (deuxième voyage) ou en morceaux. Trafic (contraire à l’éthique du respect des animaux) qui permet à de nombreux intermédiaires d’engranger de somptueux bénéfices qui font encore grimper la note sans que le consommateur en profite. Le profit va essentiellement à ces filières d’ailleurs souvent contrôlées ou organisées par la grande distribution.
Le lecteur, au moins certains d’entre-eux, objecteront que nul n’est contraint de manger de la viande. Mais le problème c’est qu’une grande partie des autres produits, surgelés ou conditionnés, se vendent sous le même flou artistique, la provenance des composants n’étant souvent même pas mentionnée.

Les consommateurs commencent à s’en apercevoir et au moins une partie d’entre eux en tire les leçons en essayant de s’approvisionner à la ferme, par les Amap ou par d’autres circuits courts. Ce qui incite d’ailleurs, car les ventes des grandes surfaces s’essoufflent, la grande distribution à tenter de mettre la main sur ces nouveaux circuits de vente ou à faire semblant de les imiter.

Tant que le groupe de pression que constituent les quelques centrales d’achat trouveront une oreille très attentive au gouvernement et chez les parlementaires, les accords passés (et à venir) ne seront pas respectés et ce sont les paysans et les consommateurs qui continueront à payer la facture de ces pratiques qui entrainent le recul de l’agriculture française. Un seul rappel pour illustrer cette situation : si les éleveurs de moutons n’étaient pas fortement concurrencés par les importations en provenance de Nouvelle Zélande ou d’Irlande, ils n’auraient pas besoin d’accuser le loup de remettre en cause leur filière…

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