Crash du MH17: un rapport accablant pour la Russie et les complotistes de tous bords

Ce rapport international rappelle ce qui était de notoriété publique face aux élucubrations de l’extrême-gauche et de l’extrême droite: un avion de passagers abattu par un missile russe

Claude-Marie Vadrot  • 30 septembre 2016
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Le rapport d’enquête de la justice néerlandaise, avec l’aide des experts de la Malaisie, de l’Ukraine, de l’Australie et de la Belgique, vient de confirmer ce qui était déjà su quelques jours après le crash du vol MH17 dans la partie occupée de l’Ukraine : l’avion malaysien a été abattu le 17 juillet 2014 par un missile russe tiré depuis la zone ukrainienne contrôlée par les séparatistes. Lesquels bénéficiaient et bénéficient encore de l’appui logistique et humain de l’armée russe depuis les débuts de l’insurrection.

Surprise, après la publication de cette enquête qui a exploré toutes les pistes et examiné toutes les sources, on n’a guère entendu les complotistes brevetés, ceux qui avaient accusé la CIA, les Etats-Unis, le Pentagone ou l’Europe d’être à l’origine de ce crime qui a fait 298 victimes. Où sont-ils donc ces complotistes de l’extrême-gauche, de l’extrême droite et parfois de la droite ? Ceux qui, par exemple, m’insultaient copieusement parce que revenant d’un reportage dans la zone occupée, je rappelais que j’avais vu circuler une batterie lance-missiles mobile servie par des militaires ne portant aucun signe national distinctif sur leurs uniformes neufs. Ce qui m’interdisait alors et m’interdit encore de décider, ne les ayant pas entendu parler, s’ils étaient Russes ou Ukrainiens de l’Est. Si tant est que l’on puisse établir une vraie différence langagière entre un Russe et un habitant russophone du Donbass.

Balayant les élucubrations, les enquêteurs ont réussi à prouver une chose : le missile a bien été tiré depuis la zone occupée ; dans la zone de Pervomaïski où, par hasard, j’avais vu passer puis stationner une plate forme de lancement accompagnée par un camion bardé d’antennes, peut-être la centrale informatique de lancement. Ce qui est certain enfin, c’est que l’armée ukrainienne ne disposait pas d’un tel matériel de guerre permettant d’atteindre un avion en haute altitude.

Tout cela avait été assez rapidement su, mais les chantres de Poutine, de la pauvre Russie menacée par la coalition Europe-Etats Unis, se sont très rapidement lancés, dans la presse et sur internet, dans une ahurissante campagne de désinformations au sein de laquelle se croisaient des explications techniques les plus farfelues avancées par des internautes, voire par des politiques, ne possédant aucune compétence particulière. De plus, bien que n’ayant jamais mis les pieds en Ukraine et dans la zone occupée, les mêmes complotistes affairés à défendre Poutine et les rebelles, invoquaient le « fascisme au pouvoir en Ukraine » et l’appui qu’il recevait de l’Occident. En opposant « ce qu’ils savaient » à ce que j’avais vu. Attitude qui concernait à peu prés tous les journalistes revenant de reportage dans cette région.

Ces gens sont aujourd’hui quasiment muets, peut-être prisonniers de leurs délires passés ; à moins qu’ils préparent de nouveaux raisonnements politico-militaires tordus pour absoudre la Russie, ou plus exactement le gouvernement de Poutine. Un pouvoir qui maintient sa férule armée sur la Crimée, qui persécute et emprisonne la minorité Tatare dans cette province occupée illégalement et qui poursuit son aide en hommes et en matériel aux rebelles de l’Est ukrainien. Mais sur ce point comme sur celui du crime de juillet 2014, la tendance est désormais à l’indulgence, celle de la droite, ayant rejoint celle de l’extrême gauche et de l’extrême droite. Poutine est en passe de gagner la bataille de l’info et de la diplomatie…

Pourtant, pour être retourné cet été dans toutes ces régions, je sais que la situation n’y a pas changé et que la pression (politique, économique et militaire) russe s’y fait toujours sentir chaque jour tandis que la population lutte contre la pauvreté, voire la malnutrition. Ce qui est tragique, c’est que tous ces bons apôtre comploteurs du continent internet et les délégations parlementaires françaises (ou autres…) « baladées » sur place, n’ont pas remarqué à quel point les populations souffrent et à quel point le pouvoir russe accroit son contrôle policier du pays et son cynisme.

Il suffit de tourner son regard vers Alep pour comprendre de quel bois et de quelles cruautés se chauffe la Russie…

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