9-05-18, Brignoles-Saint-Maximin

Viviane, 25 ans, suit la Marche solidaire pour les migrants de Vintimille à Londres, organisée par l’Auberge des migrants. Au jour le jour, elle retrace son périple sur ce blog, illustré par des photographies du collectif Item.

Viviane  • 24 mai 2018
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9-05-18, Brignoles-Saint-Maximin
Le 9 Mai 2018. Marche de solidarité pour les migrants, organisée par l'association l'Auberge des migrants. Lycée agricole de Saint Maximin, réception organisée pour les marcheurs, avec repas et concerts. Prise de parole de François, organisateur de la marche.
© Cyril Marcilhacy / item

L'auteure : Viviane J'ai 25 ans, je suis originaire de Bretagne, j'ai fait des études de psycho. J'ai fait six mois de bénévolat à Calais puis j'ai été intégrée dans l'organisation de la Marche des migrants. Je ne sais pas où je serai dans six mois mais mon prochain projet est un voyage humanitaire au Togo. Mon père est vidéaste. Il m'a prêté sa caméra pour que je documente ce que je vis avec les marcheurs, mais je préfère écrire... Les photographes Le Collectif item est une structure de production indépendante qui se donne le temps et les moyens nécessaires pour construire de véritables sujets, pensés comme des récits photographiques à part entière. Il rassemble aujourd’hui 12 photographes, un graphiste et une vidéaste, autour de l’impérieuse nécessité de raconter le monde, pour ne pas rester les yeux fermés. Leurs travaux peuvent être vus sur leur site ici{: target="_blank" style="background-color: rgb(255, 255, 255);" }.
Je culpabilise. Ou du moins je culpabilisais de ne pas filmer chaque instant incroyable de cette aventure. Je ne sais pas comment faire, je ne sais pas quoi filmer. Soit je filme tout, soit je ne filme rien du tout. C’est difficile : j’ai envie de vivre chaque instants pleinement mais la caméra m’en empêche. Mais j’ai aussi envie de pouvoir revivre les moments super quand je n’y serai plus. Puis j’ai relu ce que j’avais écrit au début de mon aventure à Calais, et ça m’a replongée dans cette époque-là. En fait, du moment que je continue de documenter ce que je vis, c’est bon. Que ce soit par vidéo ou par écrit. On pourra faire un mix des deux avec Papa…

Je suis à Aix-en-Provence. J’attends le groupe de marcheurs dans la Kangoo de location. Je ne sais pas vraiment si c’est au bon endroit mais c’est pas grave, on avisera au moment venu. J’ai un peu de temps devant moi. Dormir ou écrire, j’ai fait mon choix. Les fenêtres de la voiture grandes ouvertes pour laisser le vent rentrer. Je suis bien. Je suis toute seule. Vue sur le feuillage des arbres qui dansent, des herbes folles aussi, avec des coquelicots. Des sensations qui me font penser aux étés bretons.

Ce matin je n’allais pas très bien, je cherchais quelque chose. Je ne comprenais pas pourquoi ça n’allait pas. Je cherchais la réponse chez les autres, mais bien entendu, ce n’est pas la bonne méthode. Puis j’ai rencontré une femme. Elle est venue me poser les questions de base lorsque je rencontre quelqu’un sur la marche. Tu viens d’où ? Tu suis la marche depuis combien de temps, etc. ? J’ai répondu brièvement et sans motivation. Quand je ne me sens pas bien, je reste dans ma bulle, je m’isole, à chaque question ça me demande de l’effort pour répondre.

Puis quelques mètres de marche plus loin je l’entends discuter avec quelqu’un et elle dit qu’elle sait lire les cartes du tarot. Paf, je me suis ouverte instantanément et je lui ai posé plein de questions sur ça. Elle m’a sorti des infos impressionnantes sur moi, ça m’a bluffée. Notamment que j’ai besoin d’ancrage. Je crois que c’est ça ce qu’il me manque ici. Jamais les mêmes personnes, jamais les mêmes endroits, ni climats, ni paysage, ni problématiques. Le seul truc qui ne change pas, c’est moi. Je dois trouver mon ancrage en moi. J’aime croire à ces choses comme le tarot ou l’astrologie, c’est comme un jeu. Ça m’a fait voyager dans mon voyage.

Nous avons aussi discuté de choses spirituelles et de communication non violente. Je me suis vraiment sentie comprise par cette personne, elle est tombée à pique. C’est drôle parce qu’hier une amie m’a dit que je suis une personne forte, justement au moment ou j’allais pas bien.

© Politis
Publié dans
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Temps de lecture : 3 minutes
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