La Base élèves bientôt recalée ?

Christine Tréguier  • 15 juillet 2010 abonné·es

Directeurs d’élèves et parents d’élèves ont une bonne raison
de se réjouir en ce début de vacances scolaires : le 30 juin,
le rapporteur public a rendu au Conseil d’État un rapport pour le moins défavorable à Base élèves, fichier de gestion de l’enseignement primaire, et au répertoire d’immatriculation qui le complète, BNIE (Base nationale d’identifiants élèves).

À l’origine de ce fait, plusieurs recours déposés il y a presque
deux ans par deux Isérois, Vincent Fristot (parent d’élève) et Mireille Charpy (directrice d’école en retraite). Tous demandaient l’annulation des actes réglementaires créant ces fichiers et imposant aux rectorats et inspections d’académie de les mettre en œuvre, ainsi que celle de leur déclaration auprès de la Commission nationale informatique et libertés. Ces demandes étaient appuyées par deux syndicats, isérois eux aussi,
le PAS38Udas et le SNUipp 38, et par la Ligue
des droits de l’homme. Comme l’explique
le Collectif national de résistance à Base élèves (CNRBE) dans son communiqué, «  le rapporteur public, en droit administratif, est un magistrat
qui expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions
que présentent à juger les requêtes, et sur les solutions qu’elles appellent ».

Certes, ses conclusions ne sont pas l’arrêt
du Conseil d’État, mais elles sont si sévères
qu’on voit mal comment celui-ci pourrait
les occulter. Le rapporteur préconise en effet d’annuler la décision initiale de création du fichier, entachée d’illégalité puisqu’elle n’est advenue que deux ans après la mise en route du fichier et sa déclaration à la Cnil. Il recommande également de ne plus enregistrer tout ce qui peut être assimilé à des données de santé, et de laisser aux parents un droit d’opposition à l’enregistrement de leurs enfants, comme il est d’usage pour tout type de fichiers privés et certains fichiers publics. Concernant BNIE, qui prévoit d’immatriculer tous les enfants scolarisés dès l’âge de 3 ans et jusqu’à 35 ans, il pointe le caractère « excessif » de la durée de conservation des données au regard de la finalité du fichier. Il recommande de publier un acte réglementaire limitant cette durée, faute de quoi les données devraient être détruites.

Ces conclusions sont une satisfaction pour les 300 directeurs d’école qui refusaient de renseigner Base élèves, pour la vingtaine d’entre eux qui ont été sanctionnés pour cette raison et pour les quelque 2 000 parents d’élèves qui ont porté plainte pour fichage illégal. Le Conseil d’État rendra sa décision dans deux semaines, et le ministère se verra très probablement accorder tout le temps nécessaire pour faire en sorte que ces fichiers respectent enfin la loi, et les droits des uns et des autres. Ou pour une fois de plus biaiser et faire semblant
de se mettre en règle. La suite d’ici à la fin 2010, donc, mais il serait imprudent de penser qu’on en a fini avec Base élèves et BNIE.

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