Sale temps pour les assoc’

Les associations ont vu fondre leurs fonds publics en 2010. Quelles conséquences pour les usagers ?

Pauline Graulle  • 1 décembre 2011 abonné·es

Les associations françaises devront-elles à l’avenir se passer de financements publics ? Un scénario de plus en plus probable si l’on en croit une étude [^2] publiée la semaine dernière : 77 % des acteurs associatifs interrogés estiment que la part des fonds publics, qui financent aujourd’hui environ la moitié de leur budget, ne représentera qu’une « part mineure » de leurs ressources en 2020.

En cause, la décentralisation, les déficits publics et les choix politiques qui ont conduit l’État à ralentir l’octroi de ses subsides depuis les années 1990. Mais l’année 2010 a marqué un tournant : « Les collectivités locales, qui compensaient jusqu’alors le gros de la baisse, ont, elles aussi, fait les frais de la crise » , explique Viviane Tchernonog, chercheuse au Centre d’économie de la Sorbonne.

Résultat, en 2010, les conseils généraux ont coupé tous azimuts dans les secteurs « périphériques » (culture, sport, jeunesse…), mais aussi dans celui de l’action sociale. « Au lieu du traditionnel “saupoudrage”, qui créait un lien symbolique entre le secteur et la puissance publique, les collectivités ont recentré leurs financements sur les fonctions essentielles et porteuses d’emploi » , souligne la chercheuse.

Elles ont aussi développé des relations sur un mode contractuel – les subventions directes ne représentent plus qu’un cinquième du financement public contre plus d’un tiers il y a cinq ans –, la majeure partie des activités étant désormais financées via la commande publique (appels à projets, prix de journée…).

Là encore, « on observe une ­tendance à la montée des disparités entre départements riches, qui bénéficient d’un important tissu associatif, et les plus pauvres, qui n’arrivent même plus à payer le RSA » , explique Viviane Tchernonog.

Autres effets de la diminution des fonds publics : la précarisation des emplois du secteur, le vieillissement des politiques sociales faute d’innovation, et l’augmentation des prix pour l’usager, qui devra payer plus cher sa place de théâtre ou la prise en charge de ses aïeux dépendants…
« De fait, les associations vont progressivement orienter leurs actions vers les publics les plus solvables », analyse Viviane Tchernonog. Un changement en profondeur du projet associatif, dont les premières victimes seront les catégories populaires, qui ne pourront plus se payer ces services.

[^2]: « Quel regard les associations portent-elles sur leurs difficultés actuelles ? », sondage réalisé auprès de 1 256 acteurs associatifs.

Économie
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