Syrie : l’impossible mission Annan

Le massacre de Houla souligne l’échec de l’émissaire de l’ONU et de la Ligue arabe.

Denis Sieffert  • 31 mai 2012 abonné·es

La situation paraît inextricable en Syrie. Quelques jours après le massacre perpétré par le régime à Houla, le retour à Damas de l’émissaire de l’ONU et de la Ligue arabe paraît voué à l’échec. Depuis la nomination de Kofi Annan, en février, pour une médiation dans le conflit syrien, les crimes du clan Assad se sont multipliés, alors même que le plan prévoyait un cessez-le-feu et un retour des soldats dans leurs casernes.

Suprême affront, le 9 mai, c’est un convoi des observateurs de l’ONU qui était visé par une explosion à Deraa, dans le sud du pays. Et deux jours après les 108 morts de Houla et les innombrables condamnations internationales, ce sont encore 87 personnes qui ont été tuées, dont 34 à Hama, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme.

Toutes les issues semblent bouchées. Trop de sang a coulé pour qu’une solution incluant le maintien de Bachar Al-Assad, ou son remplacement par un proche appartenant au clan, soit envisageable. Une intervention militaire occidentale, même avec l’aval de la Ligue arabe, serait désastreuse. D’autant que le soupçon d’une mainmise occidentale sur un pays réputé jusqu’ici indocile et hostile au front américano-israélien risquerait de renforcer le pouvoir en place.

La troisième hypothèse n’est pas plus réjouissante. C’est celle que préconisait, lundi, le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l’opposition, en demandant aux pays « qui la soutiennent » les « moyens efficaces » pour se défendre. Ces moyens d’autodéfense – le mot est employé par le CNS – lui sont en partie déjà parvenus. Mais, là encore, l’affaire est compliquée. La militarisation du conflit donne prétexte au régime pour intensifier la répression et mener une véritable guerre contre son peuple. Elle peut être exploitée aussi par des groupes proches d’Al-Qaïda. En outre, une aide qui proviendrait du Qatar ou de l’Arabie saoudite, notoirement liés aux puissances occidentales, aurait les mêmes effets qu’une intervention de l’Otan sur une partie de la population.

Au plan diplomatique, le soutien toujours accordé par la Russie au régime de Damas agit comme une garantie d’impunité. Mais pour combien de temps ? Dans cet imbroglio, une solution négociée est sans doute la moins mauvaise. D’autant que le régime semble condamné à moyen terme. Son isolement, en tout cas, s’accroît. Mardi, la France a expulsé l’ambassadrice de Syrie.

Monde
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Turquie : « J’ai vécu un remake de l’affaire Dreyfus »
Monde 27 mars 2024 abonné·es

Turquie : « J’ai vécu un remake de l’affaire Dreyfus »

La quasi-totalité des édiles du Parti démocratique des peuples élus en 2019 ont été destitués par le régime turc au bout de quelques mois. C’est le cas d’Adnan Selçuk Mızraklı, porté à la tête de Diyarbakır avec 63 % des voix, qui depuis est en prison. Nous sommes parvenus à établir avec lui une correspondance écrite clandestine.
Par Laurent Perpigna Iban
À Jérusalem-Est, un ramadan sous pression
Monde 20 mars 2024 abonné·es

À Jérusalem-Est, un ramadan sous pression

En Palestine occupée, le mois saint de l’islam cristallise les tensions alors que les Palestiniens font face à de nombreuses restrictions de l’accès au mont du temple et à la mosquée Al-Aqsa. Elles illustrent le régime légal que des organisations de défense des droits humains qualifient d’apartheid. 
Par Philippe Pernot
« Ma vie dépend de ce qui se passe sur le front »
Ukraine 18 mars 2024

« Ma vie dépend de ce qui se passe sur le front »

Dans une interview réalisée le 28 février 2024, l’écrivain ukrainien Andreï Kourkov nous raconte l’impact de la guerre sur son travail et les questions existentielles qui se posent deux ans après l’invasion russe.
Par Pauline Migevant
Gaza : l’enfance sacrifiée
Reportage 13 mars 2024 abonné·es

Gaza : l’enfance sacrifiée

Chaque jour l’enclave palestinienne s’enfonce un peu plus dans une crise humanitaire sans précédent. Selon l’Unicef, plus de 600 000 fillettes et petits garçons ont dû fuir leurs maisons avec leur famille.
Par Céline Martelet