Mon cher vieux Rooster

L’homophobie agrège de motivés partisans du modèle social kukluxklanais.

Sébastien Fontenelle  • 18 avril 2013 abonné·es

L’autre jour, tu te rappelles, je te narrais comment que ça sentait fort le février 1934, de ce côté-ci de la ligne Calais-New York. Et tu sais quoi ? C’est toujours le cas. Même : l’ambiance est de plus en plus incommodante. Car la Réaction, complètement disjonctée, ne se contrôle absolument plus. Frau Boutin – comme on l’appelle –, qui donne des fois l’impression d’être une espèce de très inquiétante bigote hallucinée, en est à menacer ouvertement le gouvernement d’une « guerre civile », et une certaine Virginie Tellenne – épouse à la ville d’un « écrivain, humoriste et chroniqueur »  [^2] élevé sous le Pasqua –, dont les grimacements sont quelque chose de véritablement flippant, hurle désormais – te dire la vitesse à laquelle tout le truc part en quenouille – que si François Hollande « veut du sang, il en aura ».

Ces deux-là – puis plein d’autres – sont pourtant beaucoup moins intolérantes et moins recroquevillées dans l’entre-soi militant qu’on ne pourrait le supposer sur la seule foi de leurs violences verbales : la vérité oblige à reconnaître que les happenings versaillais qu’elles organisent (ou accompagnent) désormais tous les deux matins (ou midis, ou soirs), ou presque, réunissent des foules bigarrées – où le vert des lodens UMPiques se mélange, dans un rare esprit de mixité, au noir des soutanes de tardifs latinistes et au kaki des bombers des bandes néofascistes. Et certes, vas-tu me dire (car je te sais taquin) : cette promiscuité colorée – façon bâche de camouflage de la Bundeswehr  –, dans laquelle l’homophobie agrège de fait de motivés partisans du modèle social kukluxklanais, pourrait presque donner l’impression d’être un peu dégueulasse.

Mais pour prévenir – peut-être – d’éventuelles offuscations, nos deux amies (possiblement inspirées par le philosophe de médias Alain Finkielkraut, qui lui aussi voit ces temps-ci Robespierre à tous les coins de rue) vont à présent narrant, par l’un de ces procédés un rien orwelliens où la Droite aime se redorer la dignité, qu’elles sont les victimes de nouveaux hitlériens, ou de terroristes 1.7.9.3. Virginie Tellenne, par exemple, braille que François Hollande veut lui « couper la tête » – et cela est si manifestement délirant que j’en suis presque à me demander si d’aucun(e)s, dans son entourage, ne lui font pas tous les jours manger des petits champignons hallucinogènes en lui faisant croire qu’il s’agit de M&M’s. Et quant à Frau Boutin, qui semble être définitivement rendue à de plus hautes altitudes encore : elle suggère sans défaillir, et dans un amalgame où se mesure l’étendue du respect qu’elle porte aux victimes du nazisme, que les opposant(e)s au mariage pour tous sont traités sous Hollande comme jadis les juifs (liste non exhaustive) le furent sous Hitler.

Mais il est vrai que cette logorrhée peut aussi (et après tout) être regardée comme l’expression inconsciente d’une détresse : la pauvre femme, qui sait, n’est peut-être pas, au fond d’elle-même, complètement fière d’émarger aux mêmes cortèges où défilent aussi des nostalgiques de la rude Kameradschaft des années 1930 ?

[^2]: Dixit Wikipédia.

Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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