Nicolas Galepides : « L’Altersommet a relevé le gant »

Réuni les 7 et 8 juin à Athènes, cet événement européen a rassemblé mouvements sociaux, syndicats et ONG. Retour sur ce sommet des peuples contre l’austérité néolibérale.

Politis  • 27 juin 2013 abonné·es

Comment mobiliser le mouvement social européen face au déploiement des politiques néolibérales et à leurs effets sur les populations ? Comment faire converger des forces qui a priori ne se fréquentent pas, Indignés, Occupy, ONG, syndicats dans et hors la Confédération européenne des syndicats (CES) et autres organisations altermondialistes ? Comment privilégier les questions environnementales ? Porter enfin haut et fort une Europe féministe ? Comment faire partager à tout ce petit monde un programme commun, à même de rassembler pour une Europe au service des peuples ? C’est toute une liste à la Prévert qu’essaie de satisfaire le processus de l’Altersommet européen dont la première édition s’est déroulée à Athènes les 8 et 9 juin dernier. En rassemblant plus de 150 organisations, en partie issues du processus des forums sociaux européens (FSE), mais aussi venues des nouvelles formes de mobilisation comme les collectifs de Blockupy de Francfort ou les Portugais de Que se lixe a troïka (« Que la troïka aille se faire voir »), ou encore la Coalition of Resistance britannique, l’altersommet a déjà relevé le gant.

Original également, le positionnement par rapport aux partis politiques : « Nous appelons les personnalités politiques à nous soutenir (sans toutefois accepter qu’elles nous représentent), mais nous n’acceptons pas les partis politiques en tant que tels dans le réseau. » Plus fort, on a réussi à faire signer à toutes ces organisations un Manifeste pour une autre Europe, élaboré en commun et portant les revendications communes et urgentes pour une Europe démocratique, sociale, écologique et feministe ! Une petite prouesse quand on sait les dissensions et tiraillements multiples des mouvements sociaux européens. Reprenant les grandes thématiques qui conditionnent les politiques européennes – banques et finance, dette, montée des extrêmes droites, féminisme, environnement, emploi et services publics –, ce manifeste sert de plateforme revendicative et doit être développé sur chacun de ces thèmes. C’est là une des grandes différences avec les FSE, qui, sans caractère décisionnel, constituaient des espaces de débats sans « personnalité morale » à même de produire des orientations, de porter clairement un projet alternatif face à l’institution européenne. À Athènes, paradoxalement, la seule déception a résidé dans la faible participation des Grecs, qui n’a pas été à la hauteur des attentes, pour de multiples raisons tenant notamment à la complexité de la situation sociale et politique locale. Il n’empêche que le comité d’organisation grec a assuré une logistique sans faille, indispensable à la réussite des échanges d’une telle manifestation. Plus de mille personnes ont assisté à des assemblées thématiques, travaillé à consolider le manifeste et à préparer les prochaines étapes de lutte.

La barre est encore haute, mais c’est jouable, le 22 juin à Londres, ce sont plus de 4 000 personnes qui se sont pressées à la People’s Assembly face au Parlement anglais. Au programme, les luttes contre l’austérité, l’évasion fiscale, le fascisme, pour le féminisme et surtout un large appel à la grève générale des syndicats britanniques les plus importants. Un exploit face aux lois anti-syndicales qui datent de l’ère Thatcher. Le lendemain, une session spéciale était dédiée aux luttes européennes en lien avec le processus Altersommet : la convergence est au rendez-vous. Car, malgré ses faiblesses, les difficultés à traverser le mur médiatique européen, la position d’observatrice (très) passive de la CES et l’ampleur de la tâche à accomplir, il faut croire en l’Altersommet européen. Parce que c’est le seul processus largement rassembleur des luttes et expressions pour une Europe au service des peuples. Parce que partout en Europe des initiatives se créent, des luttes émergent, qu’il s’agit de les recenser, de les accueillir, d’assurer la convergence des énergies et des luttes. Parce que de Porto à Bucarest, de Thessalonique à Birmingham, on est confrontés aux mêmes ennemis des peuples, de la solidarité et de la justice sociale, qu’on les a parfaitement identifiés et qu’ensemble, tous ensemble, on peut gagner la partie.

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