Jean-Luc Mélenchon : « Je veux créer un objet politique neuf »

Après avoir jeté le 11 septembre les bases du mouvement, Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à la présidentielle de 2012, détaille le processus qui devrait conduire, selon lui, à la création d’une VIe République.

Denis Sieffert  et  Michel Soudais  • 25 septembre 2014 abonné·es
Jean-Luc Mélenchon : « Je veux créer un objet politique neuf »
© Photo : Remy Blang

Il n’est pas le seul à appeler de ses vœux une « VIe République ». Mais l’originalité du propos de Jean-Luc Mélenchon tient davantage dans le mouvement qu’il souhaite initier que dans la forme définitive de la nouvelle architecture institutionnelle. C’est peu dire que le projet est ambitieux. Il nous l’a exposé au cours d’un long entretien, vendredi 19 septembre, dans l’arrière-salle d’un café du Xe arrondissement parisien.

Qu’avez-vous retenu de la conférence de presse de François Hollande ?

Jean-Luc Mélenchon : Il y a eu moitié moins de monde pour l’écouter que la dernière fois. Et moins que pour l’émission de commentaires qui a suivi. On voit là que sa parole, et avec elle sa fonction, est totalement démonétisée. C’est l’un des spasmes de l’agonie de la Ve République. La toute-puissance du président de la République fonctionne comme un simple rouage à l’intérieur d’une mécanique européenne totalement opaque. D’instinct, comme chacun sait qu’il s’agit d’un menteur maladif, les gens se disent : « Ce qu’il dit n’a aucune valeur certaine. » N’ayant d’autre force que le rôle, le Président surcharge son intervention dans la dimension monarchique. Il est frappant de voir que, dans un contexte social pareil, il commence par un grand développement sur les guerres d’Irak et de Syrie, dans un registre purement sensationnaliste, destiné à mettre en scène le fruit principal : « J’ai décidé de bombarder. » On voit ainsi notre pays engagé dans une guerre sans que cela ait été discuté où cela devrait l’être : à l’Assemblée nationale, au Sénat et dans leurs commissions de la défense et des forces armées. En ce sens, le moment était pathétique.

L’autre événement de la semaine a été le retour annoncé de Nicolas Sarkozy…

La Ve République, qui fait tout dépendre de personnages dont les programmes sont équivalents, tue le système démocratique et républicain de la France. Hollande fait pire que Sarkozy I, et Sarkozy II se présente en disant qu’il va faire pire que Hollande. La centralisation sur de tels personnages vide la scène politique de contenu politique, il ne reste plus que des personnes dont tout le monde se dit qu’elles ne font ce travail que pour échapper à un autre. Les citoyens ne sentent ni chez l’un ni chez l’autre la passion du bien public. Et ce qui me frappe par-dessus tout, c’est l’aveuglement idéologique des deux.

Dans quel sens ?

C’est sur le plateau du « Grand Journal » de Canal + que Jean-Luc Mélenchon a annoncé, le 11 septembre, le lancement du « Mouvement pour une VIe République ». Ou plus exactement l’ouverture d’une page web minimaliste, avec un logo jaune et orange enfantin, destinée à recueillir des signatures. L’adresse simplissime (www.m6r.fr) aidant, le site s’est écroulé ce soir-là sous l’afflux de connexions.

Après le recueil de 30 000 premières signatures, une quarantaine de personnalités viennent de proposer dans un appel de « constituer un comité d’initiative, aussi large que possible, rassemblant aussi bien des personnalités du monde intellectuel ou culturel que des militants politiques, syndicaux, associatifs ». Ce comité, écrivent-ils, « déciderait collectivement de la façon d’animer [le m6r] et de l’ouvrir à toutes celles et ceux qui voudraient y participer ». Figurent parmi les signataires de ce texte, notamment, les écrivains Laurent Binet, Annie Ernaux, Pascale Fautrier et Gérard Mordillat, le journaliste et producteur Daniel Mermet, l’avocate Mylène Stambouli, l’essayiste objecteur de croissance Paul Ariès, l’universitaire Alain Garrigou, les économistes Jean Gadrey, Jacques Généreux et Liêm Hoang Ngoc, les humoristes Didier Porte et Gérald Dahan, l’historien Claude Mazauric ou Emmanuel Poilane, directeur de la Fondation France libertés. Comme un aperçu de ceux qui seront de cette aventure.

Ils sont tellement persuadés que l’unique sujet est la question de la dette, sous sa forme la plus comptable, qu’aucun n’évoque un tant soit peu un événement immense dans l’histoire de l’humanité : le changement climatique. Ni l’un ni l’autre ne considère que c’est un sujet politique par lequel il faudrait tout commencer. Cela ne les préoccupe pas que la mer monte d’1,40 mètre. Ces gens ne sont pas capables d’imaginer un autre monde que celui dans lequel ils ont vécu. C’est exactement ce qui a perdu Louis XVI et les autres monarques européens qui n’arrivaient pas à imaginer autre chose que la monarchie absolue.

En cette fin d’été, vous n’êtes pas seul à dire qu’on arrive au bout d’un système, qu’il faut en finir avec la Ve République.

J’ai seulement le mérite d’en avoir fait mon thème de campagne présidentielle et des trois marches qui ont suivi. Le terrain est mûr. Et je veux éviter l’erreur de 1992, quand François Mitterrand s’en est tenu aux propositions d’une commission d’experts.

En quoi était-ce une erreur ?

Le moyen par lequel on réforme la Constitution préfigure le contenu de la constitution future. Ce n’est pas pour rien que De Gaulle amène un texte tout prêt et demande une réponse « oui » ou « non ». La IVe République était incapable de tourner la page de l’ère coloniale. La Ve République a donc donné à quelqu’un la capacité d’opérer de manière césarienne en surplombant tout le champ politique pour trancher le nœud gordien. Par la suite, les nombreux changements de la Constitution n’ont pas été réalisés pour que le système politique colle mieux à l’arrivée d’une population éduquée et urbanisée, mais pour améliorer la courroie de transmission du système autoritaire. Celui-ci s’étant compliqué d’un nouvel étage, l’échelon européen, d’où partent des décisions prises dans des conditions a-démocratiques et exécutées dans des conditions anti-démocratiques. Le système s’est ainsi durci dans des conditions inouïes. La Cinquième que nous avons aujourd’hui est plus autoritaire, plus personnalisée et plus violente que ne l’était celle du général de Gaulle.

Vous vous distinguez en proposant un processus constituant. Pourquoi ?

C’est un message qui peut être entendu très largement. Et pas seulement dans les milieux habitués à cette discussion. Qui plus est, la question de l’élection d’une assemblée constituante, qui met à son ordre du jour la rédaction d’une constitution, est, dans mon esprit, le moment central du processus de révolution citoyenne. C’est lorsque l’on change la Constitution par une action populaire, et non par des experts qui soumettent un texte à plébiscite, lorsque le grand nombre s’empare des questions débattues dans une constitution, comme cela s’est passé au Venezuela, en Équateur, en Bolivie ou en Tunisie, que le peuple, nouvel acteur de l’histoire contemporaine, se constitue en tant que sujet politique. Comme l’explique l’anthropologue Maurice Godelier, les communautés politiques humaines ne commencent pas avec la famille. Elles commencent par un acte qui s’appelle l’exercice de la souveraineté sur lui-même et sur un territoire. Quand le peuple se fait constituant, il s’identifie lui-même en se définissant des droits. Et il affirme sa souveraineté sur les membres qui composent le peuple en assignant les droits et l’obligation pour chacun de respecter ces droits, qui est le seul devoir qu’on reconnaisse en République. En même temps, c’est l’affirmation d’une souveraineté sur l’espace à l’intérieur duquel ces lois s’appliquent, d’où le caractère un et indivis de la République. Vous voyez, la VIe République n’est pas un arrangement institutionnel, ni une simple aération modernisante des relations sociales dominantes d’une époque, mais l’outil pour les transformer profondément.

Une VIe République est-elle possible dans l’Europe actuelle ?

Quelqu’un devra céder. Si les Français veulent faire une VIe République, personne n’est de taille à les en empêcher. Mais l’Europe aura à connaître la contagion subversive que le projet contient. Toutes les structures sont déjà en train d’exploser. Qui aurait imaginé il y a cinq ans que l’Écosse aurait à voter pour savoir si elle reste dans le Royaume-Uni ?

Vous lancez un mouvement dont l’aboutissement n’est pas défini…

C’est toute la difficulté. Comment amorcer un processus sans en préfigurer la conclusion ? Et comment préfigurer – il le faut bien pour mettre en mouvement le plus grand nombre – sans figer la capacité d’initiative populaire ? C’est une question que l’on retrouvera tout au long de la mise au point des nouvelles institutions. Voilà pourquoi, pour l’instant, je n’ai mis en avant au plan institutionnel qu’une seule proposition concrète, combinant République et révolution : le référendum révocatoire. C’est-à-dire la possibilité pour le peuple, dès lors qu’il atteint un nombre prédéterminé de signataires inscrits sur les listes électorales, de commander un référendum pour décider si un élu, quel que soit son niveau, doit interrompre son mandat.

Vous êtes pour le retour de la notion de mandat au sens fort ?

Absolument. Si le concept de mandat et l’obligation de compte rendu de mandat se sont tant dévalorisés, dans un système qui s’est monarchisé, c’est parce que c’était le seul moyen de faire accepter et subir au peuple une orientation politique, le néolibéralisme, qu’il a rejetée chaque fois qu’elle a été explicitement soumise à ses suffrages. François Hollande a été élu sur la base du rejet de la politique néolibérale de Nicolas Sarkozy et parce qu’il prétendait affronter la finance. Jacques Chirac a été élu président de la République sur la base de la « fracture sociale »… Ce système ayant réussi à créer une hégémonie culturelle sur les grands rouages de la politique néolibérale en les faisant passer pour l’état de nature – la concurrence libre et non faussée, le libre-échange comme étant spontanément bienfaisant –, la notion de mandat s’est perdue. Un mandat de quoi puisqu’il n’y a qu’une seule politique possible ? Or, il faut quand même que l’on y revienne, les gens sont élus et pas oints ! On invoque souvent « l’onction du suffrage universel ». Cette expression horrible renvoie à l’Ancien Régime. On n’est pas oint, on est « chargé de ». Et l’idée même que l’élu a une responsabilité à l’égard de la société s’est diluée au profit d’une vision purement professionnelle et carriériste de l’élection.

La tendance à l’autoritarisme s’observe dans d’autres systèmes institutionnels réputés démocratiques, non ?

La pente du capitalisme de notre époque le pousse en effet à affronter la démocratie. Le capitalisme transnational ne peut survivre qu’en étant le plus possible dérégulé, et il lui faut écarter le régulateur suprême qu’est le suffrage universel et les assemblées de citoyens. C’est pourquoi on observe partout des caractères autoritaires qui viennent doublonner avec les systèmes réputés démocratiques. Bien qu’il y ait des élections dans tous les pays de l’UE, si on veut changer de politique, la troïka européenne arrive et vous en impose une de force, avec une violence que personne n’aurait pu imaginer il y a encore dix ans. Le processus constituant est un processus révolutionnaire pour ces deux raisons : il érige le peuple en acteur de l’histoire et frappe le capitalisme au cœur de sa pire tendance, le refus de la régulation et de l’autorité démocratique.

Comment envisagez-vous ce processus ? Avec le Front de gauche ? D’autres composantes de la gauche ? Dans un lien direct avec appel au peuple ?

Pour moi, la révolution citoyenne n’est pas une phrase dans un congrès, c’est une méthode politique. Je pars du résultat de mon travail politique et de l’analyse de l’échec du Front de gauche aux élections européennes. Ses erreurs internes, comme l’illisibilité de la stratégie municipale, n’expliquent pas tout. Au Parti de gauche, nous pensons que nous avons fait l’erreur de nous écarter de la stratégie initiale qui était d’épouser la pente conduisant la société à dire « qu’ils s’en aillent tous ». Plus les élections se sont succédé, plus les grands blocs patrimoniaux partidaires se sont décomposés et dilués. La perspective, qui était la nôtre, de passer en tête de la gauche n’a pas de sens pour la grande masse des Français, qui se contrefichent de savoir qui est la vraie gauche, la fausse gauche… Pour elle, la droite et la gauche, c’est du pareil au même ; et il n’y a qu’une gauche, celle qui est au pouvoir. Nous avons aussi regardé les résultats de Die Linke, de Syriza, et la percée de Podemos en Espagne. Nous en avons tiré une leçon que je résume en deux formules : « Le système n’a pas peur de la gauche, il a peur du peuple. » C’est donc dans l’énergie populaire et son rassemblement que se trouve le ressort. Deuxième formule : « Il ne s’agit pas de rassembler la gauche, il s’agit de fédérer le peuple. » Et il peut apparaître qu’en voulant rassembler la gauche on s’empêche de fédérer le peuple. Nous ne sommes pas dans le champ du système, nous ne voulons pas l’être, et notre but est subversif. L’élection de 2017 fonctionnera comme une subversion citoyenne. Il faut donc en rassembler les éléments pas à pas. La stratégie VIe République est le grand-angle qui permet d’engager d’amples secteurs de la société en empêchant l’explosion qui à tout moment nous menace. On l’a vu lors de l’élection européenne. Alors, pour vous répondre, ce n’est pas ou le mouvement VIe République ou le Front de gauche, mais les deux !

Les autres composantes du Front de gauche partagent-elles cette stratégie ?

Sur le concept, il n’y a aucune divergence à l’intérieur du Front de gauche. La VIe République est dans le programme l’Humain d’abord, et les trois grandes marches de la campagne présidentielle, la Bastille, le Prado et le Capitole, ont eu lieu sur fond de scène « Vite la VIe République ». Ensuite, tout le monde comprend, je suppose, que la méthode doit ressembler à l’objectif, et que si nous commencions le processus de VIe République par un cartel Front de gauche, nous serions ramenés au point de départ, là où nous étions lorsque nous avons rencontré EELV ou tel groupe de frondeurs… Le but est d’abord de trouver 100 000 personnes. On ne les trouvera pas en leur proposant, comme d’habitude, de valider la valeur du cartel politique dispensable que nous constituons avec le Front de gauche.

Le processus que vous proposez ne se substitue donc pas au Front de gauche ?

Cela ne le remplace pas, cela l’inclut. Parmi les milliers de premiers signataires, il y a des militants de gauche par wagons, et on verra bientôt qu’un très grand nombre de dirigeants du Front de gauche sont personnellement signataires. L’idée d’une construction politique qui nous permette de passer du cartel au front du peuple, c’est-à-dire à quelque chose qui rassemble le peuple dans sa diversité d’adhésions, de cultures et de positions sociales, était le cœur de notre programme. Comment peut-on imaginer des constructions politiques autres que transversales dans une situation où il y a 9 millions de pauvres et 5 millions de chômeurs ? Pour parler franchement, où sont dorénavant les lieux de la socialisation politique ? Pas dans l’entreprise : les gens y sont sauvagement réprimés et beaucoup ne peuvent pas y être. Pas non plus dans les associations : elles sont aussi mal en point que les partis politiques. On ne peut pas imaginer une stratégie révolutionnaire qui se dispense de savoir comment se rassemble la force qu’elle veut mettre en mouvement. On me dit qu’il faut que ce soit à partir de contenus : la VIe République en est un, et le plus transversal puisqu’il concerne le pouvoir de chacun. Évidemment, je me heurte à toutes sortes de difficultés traditionnelles, qui viennent du penchant à l’autocritique très répandu dans nos milieux. Il n’y a pas eu une marche à laquelle j’ai appelé dont on ne m’ait dit que c’était une erreur de l’avoir fait, que le mot d’ordre n’était pas le bon, que ce n’était pas le bon jour… Cela s’est réglé par le fait que les gens sont venus. Eh bien là, il en va de même. Maintenant, la difficulté est de savoir comment lancer quelque chose dont je veux que ce soit un objet politique absolument neuf. Qui utilise les techniques de mon temps, renvoyant au rang des vieilleries, utiles certes mais dépassables, les anciennes formes d’organisation.

Ces anciennes formes, c’est que vous appelez la cartellisation ?

La cartellisation, c’est la réunion obligatoire dans laquelle l’emportent ceux qui parlent bien et ceux qui peuvent venir parce qu’ils ont de quoi mettre de l’essence dans leur voiture. C’est cette opposition entre le virtuel et le concret où, paraît-il, le concret est mon voisin avec qui je ne parle jamais et le virtuel la personne avec qui tous les soirs sur Facebook je partage des photos et avec qui je dialogue des heures durant par WhatsApp. On a commencé par écrire un texte minimaliste et ouvrir une page avec un modeste texte disant : « Je demande la convocation d’une assemblée constituante. » En moins d’une semaine, il rassemble 30 000 signataires à qui on annonce qu’ils seront bientôt dépositaires de la seule légitimité qu’il y aura. Ce sont eux qui proposeront et qui voteront. Il existe aujourd’hui tous les logiciels susceptibles d’effectuer ce type de tri et de contrôle mutuel. Nous aurons une déclaration d’intellectuels et de personnalités qui ne peuvent pas être rattachés à une organisation politique. Puis viendront les syndicalistes et les politiques. Après, on affichera un objectif politique : 100 000 signatures. À ce niveau, on pourra dire que le mouvement a commencé.

Quelle forme aura ce mouvement ?

On ne vendra pas de cartes, il n’y aura pas de comité central ni de bureau politique. Mais un comité technique chargé de gérer le site, un comité d’initiatives – viendra qui voudra – pour gérer les étapes. Ce sera un mouvement d’idées de gens convaincus que, ce qu’il faut faire, c’est la VIe République. Nous préparons quoi ? Des événements fortuits qui pourraient voir s’écrouler le pouvoir sous le poids de son néant, par une implosion tout à fait possible ; face à un tel événement, nous aurons tracé une ligne de sortie par le haut. Et nous préparons en même temps le rendez-vous de 2017. À cette échéance, il ne faut pas que nous fassions une campagne « people » ni partidaire, mais une campagne avec un contenu : la révolution citoyenne, la convocation d’une assemblée constituante. C’est une stratégie globale.

Votre retrait de la coprésidence du Parti de gauche signifie-t-il que vous vous mettez en retrait des prises de positions propres à ce parti pour vous consacrer exclusivement au processus de la VIe République ?

C’est mon intention. J’ai dépensé beaucoup d’énergie à la conduite politique du Parti de gauche, même si, après 2012, j’étais en retrait de fait, et que Martine Billard dirigeait le quotidien du parti. Mais il faut savoir passer à autre chose, et il est nécessaire que le Parti de gauche affirme progressivement son existence en dehors de son porte-parole le plus connu. C’est à moi d’avoir la sagesse de me mettre en retrait de la structure, de manière à ce que ses cadres se sentent totalement investis de la situation. La mission d’Éric Coquerel à la coordination politique du parti le permet.

Quel gage donnerez-vous pour assurer que le processus conduit par Jean-Luc Mélenchon ne prendra pas des positions qui ne seraient que les vôtres ?

À la première occasion, je ne m’en occuperai plus. Mon rôle est de mettre en place une organisation. C’est aussi ma liberté qui est en cause. Je veux que le processus soit autonome. J’y trouve aussi mon intérêt si l’idée de la VIe République passe de l’état de « parfum dans l’air » à une réalité de masse, puisque c’est une idée que je défends depuis longtemps. Mais j’ai d’autres combats : l’écologie politique, l’entrée en mer de l’économie française. Toutes choses qui me passionnent et sur lesquelles je veux être libre de ma parole.

Pour ne pas brouiller le message, vous astreindrez-vous à une sorte d’obligation de réserve ?

Je me dois de respecter la liberté intellectuelle de tous ceux qui participent au mouvement pour la VIe République, mais ils doivent aussi respecter la mienne. Pour que ce mouvement fonctionne pleinement, il faut qu’il soit autonome : il le sera. Le moment venu, je ferai des propositions de forme de plus en plus audacieuses. Pour l’instant, nous partons d’un processus qui a une forme encore classique (signatures, aide de militants politiques…). Mais supposons que le mouvement prenne de l’ampleur : il commencera alors à posséder un contenu insurrectionnel qui le mettra en phase avec les circonstances – ou pas. Il y a plein de réglages qui se feront en route. Raison pour laquelle j’ai hâte qu’il y ait un comité d’initiative avec un ou deux visages qui s’imposent, de manière à ce que je puisse nourrir cette dynamique par les biais qui sont les miens. Le mouvement VIe République marchera à la condition qu’existe la diversité des entrées et des modes d’exécution.

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