Justice : le projet de Center Parcs de Roybon à l’arrêt

C’est la bonne nouvelle du jour. Le tribunal administratif de Grenoble annule un arrêté préfectoral indispensable à la construction de ce projet de village vacances controversé.

Michel Soudais  • 16 juillet 2015
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Justice : le projet de Center Parcs de Roybon à l’arrêt

L’arrêté relatif à la loi sur l’eau de la préfecture de l’isère est annulé. Les compensations prévues par Pierre & Vacances n’ont pas convaincu les juges du tribunal de Grenoble qui critiquent dans leur jugement la dispersion de ses compensation :

« Eu égard à la dispersion et au morcellement des sites de compensation, à la distance séparant de la forêt de Chambaran les sites haut-savoyards et celui de l’Ain ainsi qu’à la situation des huit sites ardéchois, en rive droite du Rhône et en aval du projet, les remises en état de zones humides envisagées pour compenser l’impact du projet ne peuvent être regardées comme constituant globalement des mesures équivalentes sur le plan fonctionnel et de la biodiversité. »

>> LIRE le jugement complet et l’arrêté annulé.

Cette décision du tribunal met un nouveau coup d’arrêt au projet controversé de Pierre & Vacances. Situé en tête de bassin versant de deux rivières, au cœur de la forêt de Chambaran, un site souvent qualifié de « château d’eau » par ses opposants, le projet prévoit la construction d’un Center Parcs de mille cottages, commerces et restaurants autour de l’ « Aquamundo », une bulle transparente maintenue à 29°c, avec piscine et jacuzzi, au cœur de la forêt de Chambaran.

Une bonne nouvelle

« C’est évidemment une bonne nouvelle pour la Frapna », a réagi, le premier, Emmanuel Wormser, porte-parole juridique de la Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, qui avait déposé deux recours contre le projet. « C’est une bonne nouvelle ! » , s’est également réjoui Christian Brély, président de la Fédération des pêcheurs de la Drôme, à l’origine de deux des six recours attaquant le projet.

C’est « une victoire éclatante du droit et de l’intérêt général », a salué EELV dans un communiqué, tandis que Corinne Morel Darleux, porte-parole d’une liste rouge-verte citoyenne aux régionales de décembre en Auvergne-Rhône-Alpes, s’en félicitait sur Twitter.

« Cette décision de justice va dans le bon sens » , a aussi réagi Sabine Buis, secrétaire nationale à la transition énergétique et à l’écologie du Parti socialiste. « Les règles de la participation du public sont indispensables pour que le projet soit accepté par les citoyens » , a-t-elle estimé ajoutant que « la destruction des zones humides ne saurait être banalisée ou prise à la légère » . Le projet est pourtant soutenu depuis ses origines par une vaste coalition d’élus locaux de droite et de gauche, au premier rang desquels l’actuel secrétaire d’Etat à la réforme territoriale André Vallini (PS).

Illustration - Justice : le projet de Center Parcs de Roybon à l'arrêt - Le préfet avait promis d'expulser les zadistes en cas de validation du projet(AFP PHOTO/PHILIPPE DESMAZES).

La décision du tribunal a de quoi satisfaire les militants zadistes que le préfet avait promis d’expulser en cas de validation du projet. Installés dans une maison forestière à proximité du chantier, ils bloquent l’avancement des travaux depuis décembre. Et quarante hectares de forêt sur les 80 prévus doivent encore être défrichés avant d’attaquer les constructions. Or le groupe Pierre & Vacances n’entend pas reprendre les travaux de défrichement avant d’avoir obtenu une nouvelle autorisation relative à la loi sur l’eau.

La bataille juridique n’est pas finie

Le groupe Pierre & Vacances a en effet immédiatement annoncé son intention de faire appel , en se disant « convaincu du bien-fondé économique et environnemental du projet sur lequel il est engagé depuis sept ans » . Et annoncé qu’il allait revoir son dossier pour prendre en compte les critiques de la justice concernant la compensation des zones humides détruites. Le groupe se dit « confiant sur l’issue judiciaire finale en se référant à la décision du Conseil d’Etat du 18 juin 2015 » qui avait retenu ses arguments, ajoute-t-il dans un communiqué.

Si elle est contraire à l’arrêt du Conseil d’Etat , la décision du tribunal va dans le sens des conclusions du rapporteur public, exprimées lors de l’audience du 2 juillet. Au cours d’une audience de trois heures, le magistrat, Guillaume Lefebvre, avait recommandé « l’annulation totale, immédiate et rétroactive » de l’arrêté du préfet de l’Isère du 3 octobre 2014 qui autorisait le projet du groupe Pierre & Vacances au titre de la loi sur l’eau. Selon M. Lefebvre, cet arrêté devait être considéré comme illégal pour deux raisons: l’absence de saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) et l’insuffisance des mesures compensant la destruction de zones humides. Ces arguments avaient déjà été retenus par le juge des référés qui avait suspendu ce même arrêté le 23 décembre.

Lire > La justice donne un coup d’arrêt au Center Parc de Roybon

Mais le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative française, avait invalidé son jugement à la mi-juin. Ce matin, le tribunal de Grenoble, composé exceptionnellement de six magistrats dans sa formation de jugement, n’a retenu qu’un des deux arguments du rapporteur public : l’insuffisance des mesures compensant la destruction de zones humides.

« La partie n’est certainement pas terminée mais les travaux sont aujourd’hui bloqués » , s’est réjouie la Frapna.

Écologie
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