À la rencontre des militants de Génération.s

Pour l’anniversaire de sa création, le mouvement de Benoît Hamon a réuni ses membres. Entre adoration de son fondateur et espoirs d’horizontalité, les militants se confient.

Marie Pouzadoux  • 1 juillet 2018 abonné·es
À la rencontre des militants de Génération.s
© Photo : Les militants de Génération.s sont venus en nombre au congrès de Grenoble (Marie Pouzadoux pour Politis).

Il est 8h30 ce samedi 30 juin, au Summum de Grenoble, la pression monte pour la quarantaine de militants de Génération.s qui préparent la salle d’accueil : 1 500 personnes sont attendues ce week-end à l’occasion de son premier congrès. « Les fauves sont lâchés » glisse l’un deux, crispé à l’ouverture des portes au public.

La salle de concert aux lumières tamisées où se tient le rassemblement est prête pour l’événement. Quatre stands Génération.s sont dressés dans le hall tout en longueur. Deux points de vente et de dons, le stand du Conseil des membres et celui des Jeunes avec Génération.s ont été installés. Les militants ont envahi les lieux en quelques minutes. Le week-end promet d’être intense : plusieurs d’ateliers sont prévus tout comme de nombreuses prises de paroles et d’échanges auxquels ils sont partie prenante. Certains sont venus en force avec leurs comités locaux, d’autres seuls ou avec leurs collègues des comités thématiques nationaux.

Majorité de nouveaux en politiques

Pour bon nombre d’entre eux, il s’agit de leur première Convention. « Je n’ai jamais appartenu à un parti politique auparavant. J’ai eu le déclic avec Benoît Hamon, sur la pelouse du Reuilly il y a un an, lors de la création du M1717 », confie Isabelle, 58 ans, à la tête du comité thématique biodiversité et militante dans l’Isère. Son cas est loin d’être isolé : selon l’organisation, environ 70 % des membres sont novices en politique. Une situation similaire à celle de Lynda, sympathisante grenobloise, professeur en lycée professionnel. Celle-ci l’affirme ne s’être « jamais reconnue dans un parti politique ». « Mais le revenu universel, la position fédéraliste, la question des réfugiés avec ce regard humaniste que proposent Génération.s m’ont poussée à sauter le pas », complète-t-elle. Pourtant, elle ne se définit pas encore comme une militante et affiche ses réserves : « J’attends de voir ce qui se décidera ici et le lancement des projets au concret mais j’assiste à beaucoup de réunions ».

Isabelle elle, est très enthousiaste à l’idée d’assister à la Convention : « Hier soir j’ai dîné avec des membres venus de toute la France : on est une grande famille et un événement comme celui là permet de nous rencontrer et de créer des liens », commente-t-elle. Un engouement très fort que partagent les jeunes du mouvement. Grégoire a 24 ans et travaille au Conseil départemental du Puy-de-Dôme. L’an dernier lors de la primaire de la Gauche, il a soutenu le candidat Hamon et s’est lancé dans l’aventure Génération.s dès sa création. « Il y a une urgence sociale autant qu’une urgence écologique. Ce qui m’a donné envie de m’engager c’est la sensation que Benoît Hamon portait le projet sur le long terme », raconte-t-il. Ses attentes pour l’avenir du mouvement sont claires : « Rome ne s’est pas faite en un jour, il y a beaucoup de boulot encore pour se structurer, tout l’enjeu réside en cela ce week-end. »

Jude, 17 ans, fait partie des 30 % d’adhérents ayant déjà eu des engagements ou des sympathies pour d’autres partis politiques. Il est venu de Forbach seul. « J’ai milité pour Mélenchon au 1er tour de la présidentielle. C’est après une conférence de Benoit lors des législatives que j’ai changé de camp. Je ne me retrouvais plus dans La France insoumise, trop incarné, trop clivante et peu tolérante envers ceux qui pensent différemment ». Ainsi, depuis le mois de décembre 2017, le jeune novice en politique anime le comité des jeunes de Génération.s à Metz. S’il vient de loin pour assister à ce rassemblent, il espère fortement une clarification du sort des comités : « J’ai envie qu’on se structure tout en gardant cette liberté au niveau local. » Une idée partagée par Zerrine, qui vient du Nord de l’Isère. Avocate du droit du travail de 38 ans, elle est comme beaucoup, une ancienne du PS. Elle a quitté les rangs du parti avant la création du mouvement, et fût candidate (malheureuse) aux dernières élections législatives. « Dès que Benoît Hamon a annoncé la création de son mouvement, je m’y suis engagée. Le revenu universel m’a convaincue, tout comme la place centrale accordée à l’écologie et la dimension participative ». Aujourd’hui, elle coordonne les comités de l’Isère rhodanienne. « Génération.s a fait beaucoup plus de route en un an que d’autres partis, notamment le PS », estime-t-elle. Prochain défi : les élections européennes.

La question du chef

Une horizontalité des pratiques, certes, mais pas sans chef. « Benoît Hamon il incarne quand même le mouvement. Les gens ont besoin d’avoir une tête dirigeante mais elle doit rester symbolique », indique Lynda. Isabelle est plus tranchée sur la question. Pour elle, le fondateur du mouvement doit continuer de l’incarner comme à son lancement et aime à l’imaginer en 2022 : « Si un jour il devient président, on pourra s’en féliciter, car il est humble, ouvert au débat, c’est un atout d’être réfléchi en politique. »

Mais incarne-t-il Génération.s autant que Jean-Luc Mélenchon domine la France Insoumise ? Rien n’est moins sûr. En tout cas, ce n’est pas la volonté affichée. Ni celle d’une grande partie des militants réunis ce week-end. « Benoit tire Génération.s vers le haut, ça a beaucoup aidé au début. Toutefois, c’est un mouvement avant tout : ce n’est pas le sien même s’il l’a lancé. Ce n’est pas non plus son fan club bien qu’on l’adore », estime Grégoire, tout comme Jude qui ne souhaite pas le voir en tête de liste pour les européennes. Durement défait lors des législatives de 2017, l’ancien socialiste n’a, depuis, plus de mandat.

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