Les Frères musulmans, conservateurs légalistes

La doctrine de ce mouvement reste le compromis avec les pouvoirs établis.

Nadia Sweeny  • 11 novembre 2020 abonné·es
Les Frères musulmans, conservateurs légalistes
Hassan Al-Banna, grand-père du prédicateur Tariq Ramadan, cofondateur du mouvement des Frères musulmans, assassiné en 1949.
© AFP

Créé en Égypte en 1928 par Hassan Al-Banna, grand-père du prédicateur Tariq Ramadan, le mouvement des Frères musulmans est le plus grand représentant de l’islam politique. Il ne s’inscrit pas dans le débat sunnite-chiite. Son objectif est de libérer le pays du joug britannique et de prendre le pouvoir d’une Égypte à nouveau imprégnée des valeurs de l’islam – et donc « décolonisée ». Le développement des Frères musulmans se déploie sur les failles économiques et sociales du pouvoir en place. Ils offrent aux populations un soutien structurel par le biais d’une aide parfois qualifiée d’humanitaire dans des domaines variés comme la santé et le logement, et développent aussi l’éducation populaire, ce qui leur permet d’accroître leur puissance idéologique.

L’assassinat d’Hassan Al-Banna en 1949 les fait basculer dans la lutte armée en Égypte. La persécution qu’ils subissent du régime de Nasser durcit leur position jusqu’à faire émerger de leurs rangs un courant dit « takfiriste », qui excommunie les musulmans qui ne suivent pas leur voie radicale. Les takfiristes s’opposent à la majorité des Frères, dont la doctrine reste le compromis avec les pouvoirs établis : ils s’adaptent au contexte dans lequel ils se développent. C’est en cela qu’on les soupçonne souvent d’une forme de « double discours ». C’est aussi pour cela que les salafistes peuvent les considérer comme des « traîtres ».

De nature légaliste, ils participent aux élections égyptiennes de 2012 et remportent la présidentielle qui suit le printemps arabe. Mais ils sont renversés en 2013 par un coup d’État militaire mené par le général Sissi, aidé par des milices salafistes. En Tunisie, ils sont aussi portés par les urnes. Mais, au regard de la tension que leur arrivée au pouvoir génère, ils s’en retirent, abandonnant officiellement leurs velléités de création d’un État théocratique et s’inscrivant dans une volonté de démocratie participative. En France, les Frères musulmans sont principalement représentés par l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), devenue Musulmans de France en 2017.

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