Le congrès de Reims (épisode 2)
Depuis hier soir, Ségolène Royal est officiellement candidate à la direction du parti. Candidate contre le reste du parti. Avec un avantage: ce reste n'a pas encore de candidat commun faute d'homogenéité. Des trois motions qui le composent, le rassemblement constitué autour de Bertrand Delanoë est le plus divisé. D'où ce constat embarassé du maire de Paris, candidat au Prix de la pensée tortueuse: «Nous sommes à un endroit stratégique qui fait que nous avons beaucoup de difficultés à être au centre de la solution.»
10h25 . Martine Aubry est «est la seule qui est au point d'équilibre et peut rassembler une nouvelle majorité» , assure Yves Durand, député du Nord et proche de la marie de Lille, devant quelques journalistes. Sa candidature au poste de Premier secrétaire est «fortement probable» , confie-t-il, persuadé que « si ce n'est pas Martine Aubry, c'est Ségolène Royal» qui sera la chef. S'il dit vrai, on s'oriente vers un duel de dames.
10h30. «Reims ne doit être ni Rennes ni Le Mans» , ni un congrès de déchirements sans synthèse, ni un congrès s'achevant dans une synthèse générale de dupes, souhaite Sandrine Mazetier (pro-Aubry) qui, bien que jeune députée a connu les deux, et invite les congressistes à «faire mentir les oiseaux de mauvais augures» .
10h50. Le spectacle est aussi en salle de presse. Jean-Luis Bianco y explique Vincent Peillon sera «un peu plus qu'un n°2 traditionnel» , ce qui ne veut pas dire que Ségolène Royal se contentera de trôner: «Elle se mêlera de beaucoup de chose, elle mettra les mains dans le cambouis.» Même si ça tâche?
Manuel Valls sifflé et conspué
11h58. Attention convoi d'élephant! Ségolène Royal quitte la salle précédée de caméras et de photographes. Il est prudent de s'écarter du passage sous peine d'être bousculé sans ménagement.
12h22. «Ce parti c'est toute ma vie.» Julien Dray est à confesse: il évoque ce «jour de mai 1981» où il a «pris sa carte au PS» . L'ancien «trublion des ministres» rappelle avoir «essayé de changer [le parti] par la minorité» , fait aussi «le choix de l'efficacité dans la majorité» . Son propos sent un peu la désillusion.
12h50. Les congressistes vont déjeuner. «La guerre des nerfs continue» , confie Pierre Kanuty à une camarade croisée dans le couloir.
14h05. «Dans quel parti de gauche a-t-on vu des militants qui peuvent payer 20 euros pour déjeuner?» interroge une déléguée. Pas de solution alternative autour du Parc expo. Au PS, menu et nouvelle adhésion sont à prix unique.
14h30. Les «travaux» devaient reprendre mais il faut se résoudre au retard. Et des retards, il y en a à Reims:
- François Rebsamen, actuel n°2 du PS, devait présenter hier le rapport d'activité sur lequel les délégués doivent voter dimanche matin. Il n'en a rien fait. Et quand il a pris la parole en fin de matinée, c'était pour plaider encore pour le rassemblement autour de Ségolène Royal.
- Le résultat définitif des votes du 6 novembre n'a toujours pas été proclamé . La commission qui devait boucler ce pensum ce matin aurait-elle échouée? Il semble bien et cela augure mal du climat qui règnera ce soir au sein de la commission des résolutions.
15h36. Applaudissements et huées saluent Gaëtan Gorce quand ce rénovateur explique que le rassemblement ne peut et doit se faire qu'autour de Ségolène Royal et sa motion.
La question centrale des alliances
16h16. Ségolène Royal monte à la tribune. On n'a pas de souvenir qu'elle se soit déjà exprimé dans un congrès. Cela autorise à la croire quand elle présente ce moment comme «historique».
16h20. Premiers sifflets quand elle prétend «soigner» un parti «malade» . N'a-t-elle d'autre projet que d'être une bonne maman ou une infirmière? Quelques minutes plus tard elle dit vouloir «un parti plus maternel aux plus démunis» (sic).
16h25. A la suivre, les socialistes sont détestables puisqu'elle explique qu'ils seraient «moins détestables» s'ils suivaient son projet.
16h52. «Nous sommes ceux qu'on croit dans la tombe et qui se relèvent , lance Ségolène Royal en conclusion. Nous rallumerons tous les soleils, toutes les étoiles du ciel, nous sommes les socialistes.»
17h16. La maire de Lille veut «tenir Obama par la main pour lui dire qu'il ne faut pas oublier» les pays du Sud.
17h39. Alors qu'elle explique depuis deux minutes quelle a été la démarche de sa motion depuis le 6 novembre, Martine Aubry est un peu chahutée par des pro-Royal. Réplique sèche de la maire de Lille: «Ségolène a demandé que l'on se respecte. Respectons-nous.» Elle renverra ainsi la balle une seconde fois, un peu plus tard.
17h43. «Je le dis à Bertrand: ceux qui ont des nuances entre eux doivent tout faire pour que ça aboutisse. » Martine Aubry veut «un parti socialiste fortement ancré à gauche» et dit «qu'il y a une majorité pour faire vivre cette ligne politique demain» . La maire de Lille s'adresse principalement au maire de Paris, en descendant de la tribune, elle ira l'embrasser au premier rang. Ségolène s'était contenté de serrer la main de Delanoë.
18h25. Vincent Peillon fait rire l'assistance quand il évoque «la constance de ses positions au sein du parti socialiste» . Il est vrai que Peillon avait été l'un des cofondateurs du NPS en 2002 et avait porté les motions de ce courant aux congrès de Dijon et Le Mans. Mais en 1994, il avait déjà présenté une motion au congrès de Lévin, motion plutôt à la droite du parti.
18h49. «Le protectionnisme , explique Pierre Larrouturou, c'est comme le cholestérol, il y a le bon et le mauvais.»
19h45. Ségolène Royal, flanquée de Manuel Valls et Dominique Bertinotti, tient une conférence de presse, sans caméra ni micro. Pour ne rien de plus qu'on ne sait déjà. «La question des personnes sera tranchée jeudi prochain» , dit-elle. Ce serait vrai s'il n'y a pas plus de deux candidats. Car en cas de multiplication des candidatures, un second tour pourrait être nécessaire, vendredi. Pour l'heure, Martine Aubry maintient le suspense. Elle a jusqu'à 9h30 demain pour se déclarer. Benoît Hamon, lui, a passé l'après-midi dans sa chambre d'hôtel à préparer le discours qu'il fera demain.
La nuit risque d'être courte. La commission des résolutions se réunit à partir de 21h30. Dans ce conclave à huis-clos, le PS va essayer de se trouver une majorité. Si ce n'est pas le cas, on devrait au moins en savoir plus sur les rregroupements entre motion. Cette réunion devra aussi trancher les contentieux électoraux qui empêchent de connaître le résultat définitif du vote du 6 novembre. Or celui-ci détermine la composition du conseil national et du bureau national, pour ne pas parler de quelques instances moins en vue, comme la commission nationale des conflits. Or celle-ci, à en juger par la séance d'aujourd'hui risque d'avoir bien du travail... dans les mois à venir.
(La suite demain...)