Ségolène Royal, reine de la démagogie

Michel Soudais  • 5 novembre 2008
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Votez, on vous remboursera! Telle est, en substance, la promesse adressée hier soir par Ségolène Royal aux militants socialistes pour tenter de convaincre les derniers récalcitrants de voter pour sa motion. Une adaptation du «demain on rase gratis» commun à tous les démagogues populistes.

Pour sa dernière réunion publique avant le vote des militants socialistes sur les motions , Ségolène Royal est revenue à La Bellevilloise (Paris XXe), le lieu où elle avait annoncé sa candidature à la direction du parti avant de la mettre quelques mois plus tard «au Frigidaire» . Entourée d’une grande partie de son équipe de campagne: Vincent Peillon, Manuel Valls, Julien Dray, Aurélie Filippetti, Jean-Louis Bianco, David Assouline, Jean-Pierre Mignard, président de Désirs d’avenir, Dominique Bertinotti, maire du IVe arrondissement de Paris, la présidente de Poitou-Charentes a abattu sa dernière carte devant un peu plus de 400 fans qui l’avaient accueillie aux cris de «Ségolène, Ségolène» .

Cotisation = «Taxe sur le droit de militer»

Si elle l’emporte l’adhésion sera «définitivement fixée à 20 euros», a-t-elle promis en qualifiant la cotisation due au PS par les militants de *«taxe sur le droit de militer» .

Lundi, à Montpellier, Mme Royal qui n’a participé à aucun débat sur les motions dans le PS , préférant tenir des réunions publiques à la marge, s’était inquiétée d’une faible participation au scrutin du 6 novembre: «Je sais que sont nombreux les militants qui ne peuvent pas payer deux années de cotisations pour venir voter.» «70.000 adhérents ne sont pas revenus» depuis la campagne présidentielle, avait affirmé l’ex-candidate. Pour eux, «sortir 100 ou 130 euros pour régulariser deux années de cotisations n’est pas possible» . Selon les statuts, seuls peuvent voter aux consultations organisées par le parti les adhérents à jour de cotisation. Une circulaire interne autorise toutefois les anciens adhérents qui n’auraient pas réglé le montant de leur adhésion depuis le 31 mars 2006 à régulariser leur situation pour un montant inférieur à celui qu’ils auraient dû acquitter.

C’est encore trop pour Ségolène Royal qui hier soir s’est carrément affranchie de la légalité interne du PS. Réaffirmant que «le coût de l’adhésion ne doit plus être un obstacle» à rejoindre le Parti socialiste, elle a appelé «ceux qui ont des difficultés financières pour régulariser leur deux années de cotisation à prendre quand même leur droit, à voter et à participer à l’avenir de notre parti» . Tout en assortissant cet appel d’une promesse: «Nous les rembourserons, en tout cas nous trouverons une solution.»

En français courant, cela s’appelle acheter des voix! Les démocraties qui tolèrent ces pratiques sont dites corrompues, ce qui au sens littéral du mot «corruption» signifie qu’elles sont mortes. Et il y aurait lieu de s’interroger sur la régularité du vote de ce soir si, d’aventure, un grand nombre d’anciens adhérents venaient y participer encouragés par la promesse de Mme Royal. Il est déjà assez intolérable que de telles pratiques subistent dans quelques grosses fédérations, dont deux (les Bouches-du-Rhône et l’Hérault) défendent la motion de la présidente de Poitou-Charentes, pour ne pas accepter que le clientélisme gagne le reste du territoire.

On savait que l’ex-candidate a l’élection présidentielle avait pour devise «le parti me dois tout, je ne dois rien au parti». Force est de constater qu’elle la décline désormais à la deuxième personne du pluriel quand elle qualifie les cotisations de «taxes sur le droit de militer» . Si elle l’emportait à Reims, on voit mal comment le PS y survivrait. Comme parti, j’entends. Parce que pour ce qui est de l’adjectif «socialiste», notre opinion est déjà faite. Depuis la présidentielle.

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