Le PDG de Bricorama, chevalier de la Légion d’honneur et du travail du dimanche

Le PDG de Bricorama, Jean-Claude Bourrelier, qui bataille depuis des années pour l’ouverture des magasins de bricolage le dimanche, a été nommé chevalier de la Légion d’honneur par l’ex gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

Thierry Brun  • 22 avril 2014
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Le PDG de Bricorama, chevalier de la Légion d’honneur et du travail du dimanche

La promotion de Pâques des personnalités décorées de l’ordre national de la Légion d’honneur, publiée au Journal officiel le 18 avril, recèle quelques surprises. Ainsi, au titre des services rendus au pays, l’ex gouvernement de Jean-Marc Ayrault a nommé chevalier de la Légion d’honneur le PDG de l’enseigne Bricorama , Jean-Claude Bourrelier .

La 256e fortune (195 millions d’euros, selon Challenges) s’est pourtant taillée une réputation de lobbyiste menant une bataille sans merci pour l’ouverture de ses magasins le dimanche. Au point que Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre, a dû réunir en septembre 2013 les ministres concernés par le travail dominical, suite à un mouvement de fronde des enseignes de bricolage Castorama et Leroy Merlin qui ont ouvert 14 magasins en région parisienne, pourtant frappés d’une interdiction d’ouverture le dimanche.

A l’origine de cette interdiction, Jean-Claude Bourrelier en personne, qui avait intenté un procès et accueilli avec « satisfaction » la décision de justice ordonnant à ses concurrents de cesser d’ouvrir quinze magasins le dimanche. Une victoire au goût amer, car quelques mois plus tôt, l’enseigne Bricorama, elle-même poursuivi par FO, avait été condamnée à ne plus ouvrir le dimanche.

La bataille entre enseignes de bricolage avait donné naissance au fameux Collectif des bricoleurs du dimanche, soutenu par les directions de Leroy Merlin et Castorama. « Face aux récents événements qui touchent les magasins franciliens de bricolage et leur ouverture dominicale, plusieurs salariés de Castorama et de Leroy Merlin ont décidé de s’unir sous une même bannière pour mobiliser l’opinion publique et faire bouger le gouvernement » , défendaient ceux-ci. Une pétition, lancée le 27 septembre 2013 et adressée à « François Hollande, Michel Sapin, Sylvia Pinel, Jean-Marc Ayrault » , avait recueilli près de 13 000 signatures et achevé de mettre le gouvernement au pied du mur.

« A l’évidence le statu quo n’est pas tenable » , pouvait-on entendre au sein du gouvernement. Et quelques voix au sein de l’exécutif militait pour « les salariés qui ont envie de travailler le dimanche » . Dans l’urgence, Matignon a confié une mission à Jean-Paul Bailly , ex PDG de La Poste, avec l’idée de renforcer, et de « clarifier » la règle tout en définissant et limitant les exceptions au travail du dimanche. Le choix de Jean-Paul Bailly ne doit rien au hasard : dans un rapport daté de 2007, celui-ci soutenait une souplesse supplémentaire de la législation dans l’intérêt du consommateur. Une conviction reprise dans le rapport remis en décembre 2013 à Jean-Marc Ayrault, qui a soulevé une levée de bouclier de l’intersyndicale du commerce de Paris (CFDT, SECI, CGC, CGT, SUD).

Jean-Claude Bourrelier avait réagi le jour même de la remise du rapport, en applaudissant l’inscription provisoire, jusqu’au 1er juillet 2015, du secteur du bricolage dans la liste des dérogataires à l’interdiction du travail du dimanche. Les préconisations du rapport Bailly vont « mettre fin à l’injustice » entre enseignes… et à la chute des profits. Bourrelier a bien mérité sa médaille pour services rendus à la Nation.

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