Délit de solidarité

Ingrid Merckx  • 29 mars 2007 abonné·es

« Outrage et dégradation de biens publics en réunion » : c’est sur ce motif que Valérie Boukobza, directrice d’une école maternelle rue Rampal, dans le XIXe arrondissement à Paris, a passé sept heures en garde à vue, vendredi 23 mars. Initialement, elle devait témoigner des incidents qui ont opposé parents d’élèves et forces de l’ordre devant son établissement, le 20 mars. Ce jour-là, un sans-papiers chinois est interpellé dans un café, près de l’école Rampal, où il attend la sortie de ses petits-enfants. Alertés par une succession de rafles depuis plusieurs jours, une vingtaine de parents d’élèves, dont des membres du Réseau éducation sans frontières (RESF), se rassemblent et s’interposent. Renfort de la brigade anti-criminalité, chiens, matraques, la situation dégénère : certains manifestants se couchent par terre pour barrer la route aux véhicules de police. Véhéments mais non-violents, ils sont dispersés manu militari et à coup de gaz lacrymogène.

L’affaire, qui a beaucoup choqué parents et enfants, vire au scandale. La police utiliserait-elle les sorties d’école pour capturer les sans-papiers ? Le maire du XIXe, Roger Madec, a demandé au ministre de l’Intérieur de « faire cesser le harcèlement, les contrôles aux faciès et les interpellations humiliantes » . Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a déclaré au Premier ministre qu’il jugeait « inacceptable d’organiser des formes d’embuscade » . Idem pour la vingtaine de directeurs d’écoles qui ont demandé au recteur de condamner « le procédé de rafle ». Lundi 26 mars, les principaux syndicats enseignants, ainsi que la Fédération des parents d’élèves, le syndicat lycéen FIDL, RESF et SOS Racisme ont appelé à un rassemblement devant le rectorat ­ qui estime que cette affaire, intervenue hors temps scolaire, ne le concerne pas ­ pour dénoncer « le délit de solidarité avec les sans-papiers » . Selon un membre de RESF, l’affaire de la rue Rampal « est une sorte de parabole et peut-être une anticipation de ce qui attend la société si le ministre de la chasse à l’enfant atteignait son objectif » .

Société
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

« Les meurtres racistes actuels sont le prolongement du chemin intellectuel de l’AFO »
Entretien 3 juillet 2025 abonné·es

« Les meurtres racistes actuels sont le prolongement du chemin intellectuel de l’AFO »

Avocat de la Ligue des droits de l’Homme dans le procès du groupe d’extrême droite appelé Action des forces opérationnelles, Mohamed Jaite évoque la façon dont le racisme a été abordé au cours des audiences, parfois pour diluer les responsabilités.
Par Pauline Migevant
Commission d’enquête Bétharram : « L’État a cassé et sali des enfants par milliers » 
Interview 2 juillet 2025 abonné·es

Commission d’enquête Bétharram : « L’État a cassé et sali des enfants par milliers » 

Le rapport d’enquête sur les violences commises au sein des établissements scolaires réalisé à la suite du scandale de Notre-Dame-de-Betharram a été rendu public, ce mercredi. Politis a demandé à Claire Bourdille, fondatrice du Collectif Enfantiste, de réagir à cette publication.
Par Élise Leclercq
« Noire, musulmane, fille d’ouvriers : c’est de là que j’ai écrit un dictionnaire du féminisme »
La Midinale 2 juillet 2025

« Noire, musulmane, fille d’ouvriers : c’est de là que j’ai écrit un dictionnaire du féminisme »

Rokhaya Diallo, journaliste, réalisatrice et autrice du Dictionnaire amoureux du féminisme aux éditions Plon, est l’invitée de « La Midinale ».
Par Pablo Pillaud-Vivien
Procès AFO : quand la « peur de la guerre civile » justifie les projets d’actions racistes
Terrorisme 28 juin 2025

Procès AFO : quand la « peur de la guerre civile » justifie les projets d’actions racistes

De l’instruction à la barre, les 16 prévenus ont constamment invoqué la crainte de la guerre civile qui les a poussés à rejoindre le groupe. Ils ont brandi cette obsession, propre à l’extrême droite, pour justifier les projets d’actions violentes contre les musulmans.
Par Pauline Migevant