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Jean-Claude Renard  • 21 juin 2007 abonné·es

Vendredi 22 juin

L’art contemporain, une histoire matérielle

France Culture, de 22 h 15 à 23 h 30

Les artistes contemporains utilisent des matériaux et des techniques variés, parfois complexes, sinon inattendus. De fait, conserver, et même restaurer, les oeuvres vire au véritable casse-tête. Tel est le propos de Natacha Wolinski dans ce remarquable documentaire. Au sein des laboratoires de restauration, on ne se pose plus vraiment la question des pigments ni celle des vernis. On est plutôt confronté aux savoir-faire propres aux électriciens, aux ébénistes, aux jardiniers, aux projectionnistes et aux taxidermistes. Qu’on en juge : Michel Blazy, récemment exposé à Tokyo, remplace la peinture par de la Danette ou des flocons de pomme de terre, propose des murs enduits d’une purée de betterave ou de carotte. De son côté, Jana Sterbak présente (à Beaubourg, notamment) une robe de viande rouge cousue. Yayoi Kusama, avec My flower bed , propose une oeuvre constituée de gants rembourrés de coton (notre photo représente une autre de ses créations : Dots Obsession ). Miquel Barcelo s’est, lui aussi, laissé tenter par des oeuvres faites de salade et de viande crue. On s’en doute, la problématique de la conservation devient épineuse. Idem pour la restauration. «~Comment réparer une installation de Bill Viola~? s’interroge Natacha Wolinski. Doit-on retrouver un téléviseur d’époque ou le remplacer par un téléviseur d’aujourd’hui~?~» Le destin des peintures de Barcelo et Blazy est-il de vieillir et de mourir tel un corps vivant ?

Aujourd’hui, les acquéreurs, les musées et les artistes travaillent de concert, en amont, au moment de l’achat~; les deux premiers invitant les derniers à décrire précisément leurs processus de fabrication, à livrer un «~mode d’emploi~» de leurs créations. Il n’en reste pas moins des interrogations. Quand une oeuvre s’abîme, que fait-on~? Faut-il la détruire, la restaurer ou la renouveler~? On imagine mal la robe de viande rouge de Sterbak circuler d’une exposition à l’autre. Ce n’est donc jamais la même. A fortiori quand il existe autant de musées que de restaurateurs, et donc autant de lectures possibles d’une oeuvre. On n’est plus là dans le temps de l’art mais dans le temps organique, dans un processus rapide qui s’inscrit dans le renouvellement, qui rend l’art résolument vivant. Au reste, pour Michel Blazy, «~la seule restauration, c’est le désir de renouveler l’oeuvre~». Et si l’on entretient avec l’oeuvre un rapport qui tient du sacré, «~elle est ramenée ici à sa dimension matérielle , observe Natacha Wolinski. Où, in fine, la question du vieillissement s’impose. On n’entre plus dans l’idée de restauration mais dans la nature même de l’oeuvre~» . Parmi les interventions, celle de Pascale Samuel, auteur d’une étude pour le Fond national d’art contemporain sur la conservation préventive.

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