Un 49,3 bienvenu

Patrick Piro  • 6 décembre 2007 abonné·es

Une horreur repoussée de justesse, à 50,7 % : Hugo Chávez préparait pour le Venezuela une révision constitutionnelle à faire frémir les observateurs occidentaux, qui dénonçaient déjà la marche à la dictature tropicale. Voyez les principaux oukases concoctés : en politique, un mandat présidentiel porté de 6 à 7 ans, indéfiniment renouvelable, droit de suspendre les médias en cas de putsch, invasion, guerre ou désastre naturel. En économie, promotion de l’activité « sous les principes de l’économie socialiste », État majoritaire dans le secteur pétrolier, interdiction de privatiser les entreprises publiques, prohibition du « latifundisme », contrôle de la Banque centrale. Pour le social : réduction de la journée de travail de 8 à 6 heures, sécurité sociale pour tous, etc.

En France, on aurait appelé ça la Ve République, et le prédictateur, de Gaulle. Volet économique, la manoeuvre porte aussi un nom chez nous : Traité constitutionnel européen (TCE), qui coulait dans le bronze le libéralisme et la marchandisation des services. Côté social, la loi sur les 35 heures ou le système de protection sociale.

Oui, mais chez nous, on a le garde-fou de la démocratie contre les dérives autoritaires, rétorquent les vigies. Ça tombe bien, le Venezuela aussi.

Les États-Unis déploraient le manque d’observateurs internationaux. Les électeurs n’en ont pas eu besoin. Ils ont fait jouer leur veto, le projet n’a recueilli que 49,3 % des voix. Honorable perdant, Chávez a admis la « tendance irréversible » du scrutin, battu dans les urnes pour la première fois depuis 1999.

Mais il a aussitôt ajouté que cette défaite n’allait en rien changer son projet de « socialisme du XXIe siècle » pour le pays ­ ce qui n’est pas inconstitutionnel. Aussi, on risque sous peu d’accuser Chávez, dont tout le monde reconnaît l’habileté politique, d’avoir bourré les urnes contre son camp afin de manipuler le scrutin : alors qu’il dispose déjà de la majorité absolue à l’Assemblée nationale (l’opposition avait boycotté les législatives en 2005), une constitution cousue main aurait pu gravement le décrédibiliser.

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