Historique et horrifique

Une forte vision de « Massacre
à Paris », de Christopher Marlowe,
par Guillaume Delaveau.

Gilles Costaz  • 7 février 2008 abonné·es

Bien des spectacles ont la vie trop courte, bien que l’éphémère soit par nature le destin du théâtre. Massacre à Paris , de Christopher Marlowe, créé au théâtre national de Toulouse et à celui de Strasbourg, vient de terminer à Tarbes ses représentations. Dans l’attente d’une éventuelle reprise, c’est un spectacle qui mérite d’être salué pour la qualité de l’équipe qui s’y exprime et la force de sa mise en scène, due à Guillaume Delaveau. On revient d’ailleurs beaucoup à Marlowe, ce contemporain de Shakespeare à la vie si trouble et si courte (il périt assassiné à l’âge de 29 ans, dans une taverne), puisque, parallèlement, Anne-Laure Liégeois présente son Edouard II au Théâtre 71 de Malakoff.

Massacre à Paris, c’est la violence des guerres de religion en France. Catholiques contre protestants. Avec le pouvoir qui change sans cesse de tête, puisque les chefs s’entre-tuent, de l’assassinat du duc de Guise aux décisions implacables de Catherine de Médicis. Marlowe voit ça de loin, d’Angleterre et quelques années plus tard. Mais le tableau qu’il trace est d’autant plus remarquable et moderne qu’il fait quasiment disparaître le conflit religieux. Ces gens font couler des litres de sang pour le seul plaisir du sang et du clan, en oubliant la cause de leur foi.

Quentin Baillot, Christine Brotons, Alban Guyon, Régis Laroche, Ismaël Ruggiero, Daniel Laloux et Fabrice Pierre, notamment, sont des interprètes intenses et mobiles. La mise en scène de Guillaume Delaveau évite le style constamment sanguinolent parce qu’elle change sans cesse de style. Elle est horrifique, historique, travestie, moderniste, blagueuse, de haute tragédie. C’est le grand talent de ce metteur en scène que d’arriver de façon fluide et évidente à cette diversité d’expressions enchaînées dans un mouvement incessant.

Culture
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