Politique / La démocratie participative en marche à Tours

Olivier Bruno  • 30 avril 2008 abonné·es

Bien avant l’élection présidentielle de 2007 et la thématique d’une candidate, la loi Vaillant, en février 2002, a renforcé la démocratie de proximité par l’instauration de conseils de quartier. La commission nationale du débat public pose l’élu comme arbitre des points de vue particuliers. Déjà, en 1999, la loi Voynet sur l’aménagement du territoire et le développement durable stipulait l’association de la société civile à l’élaboration des chartes de Pays dans le cadre de « conseils de développement ».

Mars 2002. La municipalité de Tours engage les habitants dans le processus d’appropriation de la démocratie locale : chartes des conseils de la vie locale (CVL), découpage de la ville en 4 secteurs et composition des CVL en novembre.

L’originalité tient dans le mode de recrutement des collèges associations et habitants par la désignation au tirage au sort. Tout en s’appuyant sur l’égalité de tous (un homme égale une voix), il permet, par le renouvellement régulier des volontaires, l’expression permanente et légitime de tous. Tous ont confiance dans les capacités de chacun, et chacun fait confiance aux réflexions et réalisation du groupe.
Les travaux du CVL s’inscrivent dans le paysage du débat public, avec les différents dispositifs de pilotage et de conduite de projets municipaux. Tout habitant peut participer aux groupes de travail des CVL. L’activité s’articule en trois rôles :
– Organe de consultation, comme lieu d’information et d’échange avec les élus et l’administration locale ;
– Instance de proposition, contributeur au pouvoir d’orientation de la municipalité ;
– Outil de participation à la gestion par son pouvoir d’initiative locale et par la disposition d’un budget d’investissement délégué à son expertise.

Alors, parodie et faire-valoir du pouvoir politique local ou réelle possibilité d’intervention des habitants et de transformation de la société, ici et maintenant ? Il se passe, en tout cas, quelque chose, un processus est en marche, en complément des représentants élus. Les acteurs de la période de lancement ont réalisé un point d’étape. Pour eux, les trois premières années d’expérience illustrent le bilan positif d’un CVL actif et réalisateur.

C’est un lieu de communication et d’échange. L’historique des thèmes abordés fait découvrir les possibilités de prise de parole et d’écoute entre concitoyens, la réflexion commune des habitants, des associations et des élus, l’apprentissage de la complexité de la gestion collective. De nombreuses idées et suggestions émergent régulièrement pour améliorer le quotidien des quartiers. Les réalisations sont significatives d’un gisement d’initiatives pour mieux vivre ensemble : achat de mobilier urbain, projet collectif et engagement d’actions autour d’une fresque, réflexions aujourd’hui relayées par la ville à propos de la passerelle Fournier, plan de signalisation des établissements scolaires, piste de skate… et réflexions plus générales sur les questions collectives (circulation, voirie, commerces…).

Cette dynamique contribue à l’élaboration et à la consolidation du bien collectif. Le besoin de consolider les acquis, de disposer d’un outil méthodologique, de passer le relais, a débouché sur la publication du Guide des conseils de la vie locale . Outil pour l’action, nourri du travail en commun, riche des enseignements qu’offrent une meilleure connaissance mutuelle et l’apport réel à la démocratie. Le CVL est, par ses thématiques et par sa pratique, un lieu de formation citoyenne des habitants[^2].

Fin 2007, un nouvel état des lieux , établi avec le concours du cabinet La Suite dans les idées, confirme ces analyses. Il souligne que « quasiment aucune structure n’a de budget dédié comme c’est le cas à Tours ». Les pistes sont ouvertes pour des précisions sur les « règles du jeu », la conduite en mode projet, une plus grande ouverture sur les jeunes, les actifs et les habitants des quartiers populaires. La réflexion actuelle fait appel d’air.

Passé les questions de sécurité et de propreté, les dépenses de convivialité (terrains de boule, mobilier urbain…), de nouveaux sujets sont lancés qui interpellent chacun et toute l’agglomération (transports, économies d’énergie, qualité de l’air). Et un grand chantier : la démocratie locale à l’ère d’Internet, avec le développement d’outils collaboratifs et les Espaces publics numériques de la ville. Autant de sujet de mobilisation et de créativité citoyenne.

[^2]: D’autres villes en sont des exemples, comme Brest et Grigny.

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