Le Stic fiche la pagaille

Fichage La Commission informatique et libertés blâme un fichier tentaculaire. Mais pour quel effet ?

Christine Tréguier  • 29 janvier 2009 abonné·es

Le Stic (système de traitement des infractions constatées) est dans le collimateur. Pendant l’année 2008, la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) a procédé à une enquête importante sur ce fichier tentaculaire, qui recense 5,5 millions de mis en cause et suscite 20 millions de consultations par an réalisées par 100 000 agents habilités (sur 142 000 policiers).
Le rapport remis au Premier ministre est accablant : durée de conservation des données non respectée (la police garde tout) ; 68 % des fiches où la qualification est celle de la police et non celle retenue par le juge (sachant que la « qualification fixe la durée de conservation » , qui varie de 5 à 40 ans) ; 79 % des classements sans suite, 70 % des relaxes et 99,5 % des acquittements ne sont pas transmis au responsable du traitement pour modification par les parquets. En outre, 83 % des fiches consultées dans le cadre du droit d’accès indirect (1 252 cas en 2007) seraient inexactes. Sans compter des mots de passe qui se baladent et des consultations pléthoriques et incontrôlées.
Le manque de fiabilité du Stic est tel que la police ne s’en servirait plus guère pour ses enquêtes. En revanche, la Loi sur la sécurité intérieure de 2003 aidant, il servirait beaucoup aux enquêtes administratives. Effectuées à la demande des préfets pour autoriser l’embauche d’agents de la Fonction publique, de personnel de sécurité, de magistrats, etc., ces enquêtes concernent plus d’un million d’emplois. Elles ont valu à plus d’un fiché un refus d’embauche ou un licenciement, sans plus de vérification. Est-ce au préfet de vérifier si le responsable ou les parquets ont bien fait leur travail ? C’est ce que suggère la Cnil. Mais que peut la commission pour empêcher le fichier de nuire ? La nouvelle Loi informatique et libertés lui bloque tout pouvoir. Elle interpelle donc le Premier ministre et préconise de faire un grand ménage avant de basculer du Stic à son successeur, le fichier Ariane, et de veiller à ce que les responsables, c’est-à-dire le ministère de l’Intérieur, respectent la loi et contrôlent habilitation et traçabilité des consultations. Elle suggère enfin de lancer le système informatique Cassiopée, qui permettra aux parquets de collecter sur tout le territoire les informations qui leur sont nécessaires.
Cela suppose de mettre des moyens que l’État n’a pas, et qu’il aurait déjà mis quand il en avait si l’objectif lui avait paru prioritaire. Mais attention, la Cnil promet de refaire un contrôle… dans trois ans.

Le rapport en ligne : [-www.cnil.fr]

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