Le gris de l’errance

Un « Godot » magnifiquement éclairé par Bernard Lévy.

Gilles Costaz  • 26 mars 2009 abonné·es

Dans sa route vers la parole rare et le silence, Beckett est encore très bavard dans En attendant Godot. On connaît l’histoire, ou plutôt l’absence d’histoire, remplacée par des énigmes et des errances. Face à l’attente immobile de Vladimir et Estragon, interrompue par le passage d’un maître et de son esclave tenu en laisse, le metteur en scène Bernard Lévy n’a pas voulu ruser avec les sévères indications scéniques de l’auteur. Tout est gris, sous une belle lumière de lune, dans ce décor de Giulio Lichner, qui a juste stylisé en deux traits l’arbre dressé sur la scène. Les personnages sont blafards ou marqués : ils ne sont pas jeunes, ils ont souffert ou pris de la bouteille. Et ils luttent de tout leur corps contre les mystères de l’attente et de la vie.

Gilles Arbona et Thierry Bosc (Vladimir et Estragon) se passent la balle métaphysique, clownesque et paillarde en donnant à leur camaraderie une complicité anguleuse. Patrick Zimmermann compose un Pozzo de haut vol, un tyran de grande envergure théâtrale. Georges Ser interprète Lucky, la victime tenue au bout d’une corde, d’une manière si bouleversante que le public applaudit son long monologue (on n’avait jamais vu un Godot que les spectateurs saluaient en cours de route !). Quelle intelligence de l’œuvre en tout point ! Ce Godot s’inscrit dans les grandes étapes de notre vie avec Samuel Beckett.

Culture
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