Les fantômes de l’histoire coloniale

Les relations de l’Algérie avec la France restent problématiques. L’exigence d’une repentance de l’ancienne puissance coloniale resurgit fréquemment dans le débat politique algérien.

Benjamin Stora  • 9 avril 2009 abonné·es

La France, en raison d’une longue histoire, que l’on sait coloniale et compliquée, et par la forte présence d’une immigration algérienne sur son sol, garde des rapports étroits avec l’État algérien. Cinq milliards d’euros de contrats ont été signés lors de la visite de Nicolas Sarkozy en 2007. Total a remporté un contrat pour la construction et la gestion d’un complexe à Arzew. Le projet est estimé à 3 milliards de dollars : 51 % pour Total, 49 % pour Sonatrach. Pour GDF, il s’agissait d’un investissement d’un milliard de dollars dans un champ qui sera mis en production en 2011. Après un accroissement de 75 % en 2005, les flux français d’investissement ont plus que doublé en 2006 (+ 111 %) : la France a renforcé sa position de premier investisseur hors hydrocarbures en Algérie avec 245 millions de dollars.
En flux cumulés depuis 1998, la France constitue le second investisseur tous secteurs confondus, mais désormais derrière les États-Unis, avec 1,02 milliard de dollars.
Pourtant, les rapports entre les deux pays restent difficiles. Le vieux fantôme de l’histoire coloniale a resurgi avec le vote de la loi du 23 février 2005, annonçant dans son article 4, le « rôle positif de la colonisation ». Jacques Chirac a certes abrogé l’article en question, en janvier 2006, mais la tension sur ce sujet du passé n’est pas retombée. Au contraire. Pendant la campagne électorale présidentielle en 2007, le candidat Nicolas Sarkozy a multiplié les discours sur « l’antirepentance ». L’inauguration en décembre 2007 d’un mur des victimes du FLN, à Perpignan, à la mémoire des disparus français et harkis de la guerre d’Algérie, à l’initiative d’un certain nombre d’organisations de rapatriés, a ranimé la « guerre des mémoires ». Pourtant, presque en catimini, une décision encore inconcevable il y a quelques années a été annoncée. La condamnation en mai 2008 par l’ambassadeur Bernard Bajolet des massacres de Sétif et de Guelma de mai 1945. Un « petit pas » qui permettra, peut-être, de passer enfin des mémoires blessées à l’écriture de l’histoire.

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