Un si long voyage

Brassant les mythes, tissée de fantasmes et de légendes, l’histoire des Tziganes, apparus en Europe au XIVe siècle, se confond avec une culture de l’exclusion.

Jean-Claude Renard  • 23 avril 2009 abonné·es

Longtemps, l’origine des Tziganes est restée inconnue, mêlée d’imaginaire, de fantasmes et de légendes. Aujourd’hui, les historiens s’accordent sur les hauts plateaux du nord de l’Inde comme lieu d’origine, comme point de départ. Une Inde dans laquelle ils pratiquaient les métiers d’équarrisseur, de tanneur, de bûcheron, de chiffonnier. Les premières migrations auraient suivi les routes de l’Iran et de la Grèce.

Si les raisons d’un voyage, plusieurs fois séculaires, demeurent inconnues, l’apparition des Tziganes en Europe est attestée au XIVe siècle. Trois flux principaux traversent alors le vieux continent. Au nord, entre la Pologne, l’Allemagne, la Belgique. Au ­centre, à travers la Roumanie, la Bohême, les Balkans. Enfin, au sud, circulant de Turquie en Espagne, de Grèce au Portugal, flirtant avec les bords de mer. Selon les directions, les nominations varient (au diapason des spécialistes). Les Manouches au nord, les Gitans au sud et les Roms au centre (dont le nom, aujourd’hui, prend la valeur d’un générique, à l’instar du terme Tzigane).

Quant à la langue, elle dérive de parlers populaires proches du sanskrit, avec des éléments communs à l’hindi et au népali. Au gré des migrations, la langue s’est ramifiée pour donner naissance à différents dialectes, empruntant ses vocables sur les lieux de passage. Il n’existe donc pas une langue tzigane mais plusieurs langues.

Au cours du haut Moyen Âge, les Tziganes vivent un accueil plutôt tolérant. Selon certaines sources, ils sont même privilégiés, reçus par les aristocrates, obtiennent des sauf-conduits de protection. L’établissement des frontières, à la Renaissance, change les mentalités. La chasse aux vagabonds est ouverte. Par définition, les gens du voyage en sont. Leurs modes de vie, leurs traditions inspirent la crainte, nourrissent les préjugés et la vindicte des sédentaires. La répression sera systématique pour des individus marqués par le rejet. Une marginalisation et une exclusion que le régime nazi a fait basculer dans la déportation et l’extermination.

Si le nomadisme constitue l’identité même des Tziganes, la culture de l’exclusion est aussi la leur, se confondant avec leur histoire. Aujourd’hui, minorité la plus importante d’Europe, ils tendent à se sédentariser. Encore faut-il qu’ils soient acceptés par les autorités.

Publié dans le dossier
La cause des Roms
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