« Pas à pas, fabriquer du commun »

Politis a rencontré Clémentine Autain et Pierre Cours-Salies, deux des animateurs de la Fédération pour une alternative sociale et écologique, avant son université d’été, qui se tiendra du 27 au 30 août.

Michel Soudais  • 17 juillet 2009 abonné·es
« Pas à pas, fabriquer du commun »

Politis : Vous venez
de rencontrer le NPA et le PCF,
et vous devez rencontrer
le PG et la Gauche unitaire prochainement ; une entente aux régionales est-elle possible ?

Clémentine Autain : La Fédération pour une alternative sociale et écologique agit pour la mise en mouvement de toutes les forces qui veulent une politique de transformation. Pour les élections régionales, une unité à la gauche du PS nous paraît possible. Les composantes du Front de gauche ont annoncé leur volonté de poursuivre et d’élargir leur dynamique. Le NPA semble avoir retrouvé le chemin de l’unité.
La Fédération participera aux différents groupes de travail qui vont se mettre en place pour travailler sur des exigences communes. Sur la stratégie, une campagne autonome au premier tour et une fusion démocratique avec les autres listes de gauche au second constituent la clé d’un large accord. Il faut construire une dynamique populaire, rassemblant les forces sociales et politiques et les individus qui aspirent à un partage des richesses, des pouvoirs et des savoirs, qui veulent porter l’idéal d’émancipation humaine. L’enjeu est bel et bien de bâtir de nouvelles majorités sociales et politiques, pas seulement un partenariat entre organisations. Sans des luttes efficaces à l’automne, comment espérer des victoires de gauche au printemps 2010 ?

Avec le départ de Martine Billard des Verts pour le Parti de gauche, la Fédération perd une de ses composantes. Vous y attendiez-vous ?

Pierre Cours-Salies : Oui, les militants d’Écologie solidaire estimaient depuis plusieurs mois qu’ils n’avaient plus de place au sein des Verts. L’occasion a été une déclaration de Daniel Cohn-Bendit. Placer l’écologie au cœur du projet de l’alternative politique ! Cette option a toute sa place lors de notre université d’été. Quant au processus d’élargissement de la Fédération, il va se poursuivre jusqu’à l’Assemblée l’assemblée générale en décembre, et après.

Cette université d’été sera donc l’occasion de préciser en quel sens vous parlez d’« une force politique nouvelle » ?

C. A. : Ces journées du 27 au 30 août seront un moment de travail et d’échanges, dans un cadre convivial, à Aubagne. Les thématiques seront très diverses : quelle alternative de dépassement et de remplacement du capitalisme ? Quelle « révolution démocratique » ? Quels rapports entre le social et le politique ? Comment unir la lutte contre les inégalités sociales et les luttes écologiques ? Quels nouveaux droits pour faire vivre l’égalité ?

Pourquoi et comment constituer une force politique nouvelle ?
Lourd programme 
!

P. C.-S. : La première journée sera consacrée à la nature des urgences. La crise profonde, due aux déréglementations financières de la globalisation, n’est pas séparable de la crise écologique et climatique. Elle produit une masse de misère, détruit les droits sociaux et les systèmes de solidarité.
Le monde n’a pourtant jamais été aussi riche et porteur de potentialités. Balisons les chemins de la transformation radicale, des luttes de résistance à la volonté de changer le mode de développement et de consommation. Le deuxième jour poursuit le fil des exigences portées par les mobilisations. Comment impulser une convergence en gestation et créer les conditions d’une offensive sociale générale ? Dans le monde de la santé ou dans les universités, parmi les chômeurs et les précaires, dans les entreprises, à La Poste et dans tant ­d’autres secteurs, des mouvements portent des éléments d’alternative à la logique du profit et du contrôle social. Une question nous importera tout particulièrement : comment constituer une dynamique politique avec et dans les quartiers populaires ?
Et aussi la question palestinienne, décisive pour la réalité démocratique en Europe même : une soirée de débat est prévue avec l’historien israélien Shlomo Sand, auteur de Comment le peuple juif fut inventé.

Un carrefour de questions… Mais en quel sens voulez-vous déplacer la question classique du « débouché politique » ?

P. C.-S. : Le troisième jour vise à préciser ce que nous appelons « révolution démocratique ». Cela exige de lier des interrogations insépa­rables : quelle nouvelle force politique et quelle stratégie ? Nous ne proclamons pas une conclusion achevée. Mais il s’agit de préciser une question : comment dépasser le modèle des « partis » du XXe siècle, la hiérarchisation stérilisante entre ce qui se présente comme « politique » et les luttes associatives, syndicales, mobilisations et activités citoyennes. Dans notre projet, la participation de chacune et de chacun est un souci majeur, en lien étroit avec l’enjeu essentiel du pluralisme.

C’est donc une étape pour la Fédération ?

C. A. : Oui. Nous voulons contribuer à tisser des passerelles entre les différentes forces. Outre les membres de la Fédération, des militants du NPA, du PG, du PCF, des Verts, de nombreuses organisations syndicales et associatives sont invitées à participer et à intervenir. Nous souhaitons que soient traités les éléments de divergences et dégagés les points d’accord. Il s’agit pas à pas de fabriquer du commun. La table ronde et le débat du dimanche 30 août, intitulé « Une alternative à la gauche du PS », permettront de vérifier l’avancée de la réflexion des composantes politiques de l’autre gauche. Ce sera pour nous une première expérience, la Fédération est toute jeune. Nous voulons être utiles à toute la gauche de transformation en posant ainsi un jalon.

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