Après le boom, le krach

À la veille du 80e anniversaire de la crise
de 1929, William Karel revient sur la Dépression, entre photographies et images d’archives.

Jean-Claude Renard  • 22 octobre 2009 abonné·es

New York des années 1920. Années folles qu’on dit. Le gouvernement martèle les mots « confiance », « prospérité durable » et « bien-être ». Le boom économique tourne à l’euphorie générale. Une famille sur cinq possède déjà une automobile. Pour beaucoup, une époque formidable. En 1926, un nouveau système d’achat d’actions est mis en place, nécessitant une couverture de seulement 10 %. Acheter à crédit est un acte naturel. Wall Street passionne les foules, en transe de boursicotage. On a l’impression de s’enrichir facilement. Pour la première fois, la Bourse est associée à tous les ­plaisirs. Les cours sont multipliés par quatre en cinq ans, l’indice Dow Jones passe de 100 à 400. Une hausse ­démesurée au regard de l’économie réelle. Deux milliards de dollars sont investis sur les marchés. Chaque jour, une nouvelle société d’investissements est créée. Tant que le prix de l’action monte, la somme avancée en garantie est couverte. C’est un jeu d’enfant qui permet de multiplier sa mise de départ. Mais quand les prix commencent à chuter, il faut rembourser la différence entre le montant emprunté et le prix de l’action. Et en liquide. Fin de la rigolade, après trois années de spéculation.
Le mardi 29 octobre 1929, 13 millions de titres sont jetés sur le marché par des actionnaires affolés, tandis que le Président américain, Herbert ­Hoover, poursuit ses vacances à Hawaï. En six jours, les cours moyens chutent de 50 %. Wall Street est un « Niagara de liquidations » , la Dépression se grave sur les visages. De l’autre côté de l’Amérique, à San Francisco, aux portes du domicile de Dorothea Lange, on sert une soupe populaire. Le pavé californien est battu par les sans-abri dans un pays qui compte 14 millions de chômeurs. La photo­graphe fixe sur l’argentique la rue et ses déshérités, les campagnes, où la mécanisation agricole a chassé les plus faibles.

Dans un mélange de crasse et de dignité, Walker Evans croque pareil tableau sur la côte Est, gavée d’ouvriers itinérants. Des images illustrant très largement ce documentaire de William Karel ( Mais qui a tué Maggie ? ; le Monde selon Bush… ). Dans un récit chronologique résolument pédagogique, le réalisateur multiplie les archives, puise dans les actualités, ajoute des coupures de presse, les unes de cette grande Dépression. Reconstituant ainsi l’engrenage de la crise conduisant à la montée des populismes, en Amérique et dans la vieille Europe.

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