S’affirmer et s’ouvrir

Michel Soudais  • 13 mai 2010 abonné·es

La Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase) prépare l’acte III de sa jeune existence. C’est fin 2008, lors d’une conférence de presse convoquée à la veille des vacances de Noël, suivie en février 2009 d’un premier rassemblement national à Montreuil, que ce regroupement né de la volonté de huit organisations et courants politiques a posé l’acte I de sa création. Au lendemain des élections européennes, auxquelles elle n’a pas pris part, la Fase précisait son identité et sa volonté de rassembler la gauche de transformation sociale et écologique en lançant le mot d’ordre de son acte II : « Fédérons-nous. »

Un an plus tard, après le départ du courant de Martine Billard, qui a rejoint le Parti de gauche (PG), et quelques déconvenues aux régionales, « la Fédération », comme ses militants l’appellent aussi, cherche les moyens d’affirmer son existence, de se développer et d’influer sur la recomposition de la gauche de gauche. Ces interrogations seront au cœur des débats de son assemblée générale – la première du genre – organisée les 5 et 6 juin à Saint-Denis en vue d’ouvrir un acte III.

Cette assemblée générale constitue « un moment majeur dans la vie de la Fase » , a prévenu le Collectif d’animation national (CAN). Outre le renouvellement de l’exécutif, l’ordre du jour prévoit de redéfinir la Fase et de définir son fonctionnement. Pourquoi remettre son identité et ses orientations en débat ? Autant pour les approfondir que pour permettre à de nouveaux venus de participer à leur élaboration, expliquent les animateurs de la Fase. Ils ne cachent pas leur souhait de voir les communistes unitaires, dont l’association avait participé à la fondation de la Fase, s’impliquer davantage dans cette dernière après leur départ du PCF. Un départ qui devrait être effectif dans les jours qui viennent.

Sans préjuger des changements que pourrait induire l’arrivée de quelques centaines de militants aguerris sur son fonctionnement, c’est dans ce domaine que l’AG de juin devrait marquer un tournant. « Dans une série d’endroits, les militants de la Fase réclament désormais un outil plus construit, un système de cotisations et un mode de fonctionnement » , note Pierre Cours-Salies, membre du CAN. D’ores et déjà, à l’issue de la campagne des régionales, des structures départementales ont été créées pour stimuler des collectifs locaux trop sporadiques.

Ces questions, loin d’être purement fonctionnelles, dépendent toutefois de la conception que les membres de la Fase ont de celle-ci. Doit-elle continuer à être un lieu de débats et d’échanges entre courants politiques d’origines diverses en vue de constituer une force politique nouvelle ? Ou être déjà l’embryon de cette force politique, capable de discuter sur un pied d’égalité avec les forces existantes ? Les avis restent partagés. Mais cette dernière hypothèse semble bien avoir gagné des adeptes à l’occasion des régionales.
Car ces questions ne peuvent pas non plus être débattues sans tenir compte de la percée d’Europe Écologie et de l’existence du Front de gauche.

Insatisfaite des discussions antérieures avec cette alliance (PCF, PG et GU), qui n’ont pu aboutir à des listes communes dans les 17 régions où le PCF avait fait le choix d’être présent au premier tour sur des listes autonomes du PS, la Fase s’interroge. À l’image de cette discussion entre membres du CAN : « Nous aurions souhaité des forums locaux et des listes Front de gauche élargies depuis la base » , rappelle Pierre Cours-Salies, qui aurait bien expérimenté ce regroupement dans une quinzaine de départements. « Quelle est notre conception d’un front de gauche élargi ? » lui répond Pierre Laporte, conseiller général (ex-PCF) de Seine-Saint-Denis, qui se demande s’il ne faudrait pas « se transformer en parti politique de forme nouvelle avant d’entrer dans un Front de gauche élargi ». « Ce qui signifie être plus musclé » , renchérit Gilles Mansillon, qui n’exclut pas non plus d’examiner l’hypothèse de dialoguer sinon d’ « entrer dans la nébuleuse Europe Écologie » , conscient que le choix d’un ralliement privilégié posera problème dans des comités dont les militants sont pour certains à Europe Écologie, d’autres au Front de gauche, et certains au NPA. S’affirmer tout en restant assez ouvert pour continuer à attirer des militants du PCF ou du NPA… Le dilemme est réel. De sa résolution dépend l’acte III de la Fase.

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