La Vérité Peut Facilement Faire L’Objet De Quelques Réformes

Sébastien Fontenelle  • 30 novembre 2010
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Illustration - La Vérité Peut Facilement Faire L'Objet De Quelques Réformes

Kevin, trois ans, veut «faire éditocrate» , plus tard, vu que, vu de lui, ça donne l’impression d’être un boulot «plutôt peinard et pas trop mal rémunéré» (convenons que c’est pas tout le monde qui prend des thunes pour maraver tout ce qui pense un peu à gauche de Manuel Valls) – mais, tout de même: Kevin aimerait savoir si ça requiert «de longues études, ou quoi» ?

Plutôt « quoi» , lui répond le conseiller d’information et d’orientation (CIO): il suffit, pour se faire un chemin jusqu’à l’envié statut de forgeron du consentement, d’avoir lu 1984 , et d’en avoir bien retenu que la vérité peut facilement faire l’objet de quelques réformes – et que ça serait bien con de s’obliger à considérer que 3 + 3 = 6, quand il est si facile de suggérer que trois plus trois font plutôt sept.

Prenons Kozy, chef à l’État, et prenons Claudimbert, éditorialiste à Le Point .

La répartition des tâches, entre ces deux-là, se distribue comme suit: Kozy est le président des riches, et Claudimbert est le gars qui s’est donné pour mission de nier qu’il soit le président des riches.

Dans la vraie vie, en effet, le kozysme est «une guerre des classes au service de l’argent» , où, «derrière la façade démocratique, se dessine le tableau d’un tout autre régime: un gouvernement des riches pour les riches» : c’est prouvé là, notamment.

(Dans la vraie vie: durant que la pauvreté croît, le gouvernement redistribue ses millions à Liliane Bettencourt – merci pour elle.)

Mais qu’en dit Claudimbert?

Claudimbert en dit: Kozy «traîne, par ses imprudences d’image, un sillage d’“ami des riches”» .

Claudimbert, en quelques mots, efface donc la réalité, documentée, d’un règne dédié au gavage des possédant(e)s, et la remplace, tranquillement, par une fable où Kozy, parce qu’il peut certaines fois donner l’impression d’aimer l’argent, peut aussi donner à penser qu’il serait l’ «ami des riches» – mais en fait, non, pas du tout, mâme Dupont, n’allez pas vous laisser bêtement suborner par ce qu’en voient vos yeux: le gars serait plutôt l’ami des pauvres.

Kevin, doutant soudain qu’il soit pour de bon si facile d’énoncer impunément de si grotesques bobards, demande si le gars produit au moins quelques vraies-fausses preuves, au soutien de sa divagation?

Bien sûr que non, petit, répond le CIO: tu penses bien que s’il fallait prouver que trois plus trois font sept, l’éditocratie pointerait depuis lurette chez Pôle emploi.

Mais alors, s’extasie l’enfant: éditocrate, c’est carrément une impost… Une sinécure?

On peut dire ça comme ça, mais ça réclame des nerfs d’acier: il faut quand même beaucoup de sang-froid, pour assurer que la terre est plate.

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