Le dernier carré RPR

Après « l’ouverture », la fermeture. François Fillon rempile à la tête d’un gouvernement de combat. Objectif : sauver le clan et préparer la présidentielle de 2012.

Michel Soudais  • 18 novembre 2010 abonné·es
Le dernier carré RPR

François Fillon succède à Fillon François. Le remaniement annoncé depuis six mois a des airs de déjà-vu. Et même si le chef de l’État a tenté jusqu’au dernier moment de dramatiser ce remplacement du même en orchestrant la vacance du pouvoir une nuit durant, contrairement à toutes les traditions de la Ve République, les Français ne peuvent y voir qu’une marque de continuité. Comment imaginer que François Fillon conduise demain une politique différente de celle conduite depuis 2007 par Fillon François ? D’autant que son nouveau gouvernement resserré (31 membres) présente toutes les caractéristiques d’un repli sur le noyau historique de l’UMP.

Ce « repliement » , selon l’expression de François Bayrou, est symbolisé par le départ des débauchés de 2007, Bernard Kouchner, Fadela Amara et Jean-Marie Bockel, et l’éviction des centristes Jean-Louis Borloo et Hervé Morin, bien sûr, mais aussi Marc-Philippe Daubresse, Anne-Marie Idrac, Valérie Létard. Après l’ouverture, y compris à la diversité, vient le temps de la fermeture. Sur les 15 ­ministres de plein exercice, 3 seulement ne sont pas membres de l’UMP : Michel Mercier, inattendu garde des Sceaux, qui est en congé du MoDem ; Frédéric Mitterrand, qui doit à son patronyme de conserver la Culture et la Communication ; Maurice Leroy, député du Nouveau Centre, qui accède enfin à son rêve et décroche le ministère de la Ville.

Hormis ces trois-là, tous les autres membres du gouvernement sont encartés à l’UMP, soit 90 % de l’effectif. Et, parmi eux, les anciens du RPR trustent 52 % des postes. Les plus en vue. C’est le cas des deux ministres d’État, Alain Juppé (Défense) et Michèle Alliot-Marie (Affaires étrangères), tous deux anciens présidents du RPR, respectivement numéro deux et trois du gouvernement. Les ex-RPR sont à tous les postes importants : Intérieur (Brice Hortefeux), Travail, Emploi, Santé (Xavier Bertrand), Budget (François Baroin), Agriculture (Bruno Le Maire), Solidarités et Cohésion sociale (Roselyne Bachelot), Relations avec le Parlement (Patrick Ollier)…

Ce casting est moins celui d’un ­gouvernement de rassemblement que celui d’une équipe de campagne entièrement tournée vers 2012. Un groupe de choc, que viennent rejoindre Thierry Mariani (Transports) et Frédéric Lefebvre (Commerce, Artisanat, PME, Tourisme…), mû exclusivement par la volonté de préserver les positions d’un clan, que l’on appelait autrefois l’État-RPR. Alain Juppé, qui à plusieurs reprises avait pris ses distances avec les choix de Nicolas Sarkozy et avait promis de ne pas rejoindre le gouvernement, l’admet implicitement quand, après sa passation de pouvoir, il déclare : « Je n’ai pas du tout envie de voir la gauche revenir au pouvoir en 2012. Quand je lis les textes qui sont publiés par le Parti socialiste, notamment son dernier texte sur l’égalité réelle, je me dis qu’il est absolument impératif que nous nous mobilisions pour éviter cette expérience à la France. »

Tout ce qui pouvait ressembler à un obstacle sur la route de 2012 a ainsi été écarté. À commencer par Éric Woerth, empêtré dans l’affaire Bettencourt et, depuis mardi, sous la menace d’une enquête de la Cour de justice de la République pour « favoritisme et prise illégale d’intérêt » dans l’affaire de la vente de l’hippodrome de Compiègne.

Politique
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