Victime du syndrome chinois, Bernard Kouchner vient de décéder prématurément à l’âge de 71 ans…

Claude-Marie Vadrot  • 5 novembre 2010
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Questionné à l’assemblée nationale le 3 novembre dernier sur la visite du Président Chinois, Bernard Kouchner, a parlé de toute sauf des Droits de l’Homme et des libertés en Chine. Monsieur le ministre des Affaires étrangères a sans doute mal digéré le dernier chapeau que le président de la République a souhaité lui faire manger avant de le virer. Après avoir raté une belle occasion de démissionner au cours de l’été, Ce pauvre Bernard joue les utilités (enfin, s’il est encore utile) dans un gouvernement qui s’est définitivement assis sur toute morale internationale, même minimale. L’agenda officiel de Kouchner fait simplement apparaître qu’il a « participé » aux deux entretiens de Nicolas Sarkozy avec le président chinois mais le service de presse de son ministère d’ordinaire si prolixe n’a diffusé aucune information sur ce qu’il aurait pu dire ou entendre. Comme au gouvernement, on en retire l’impression qu’il est devenu sourd et qu’il a fait simplement de la figuration à peine intelligente. Après avoir du accepter, couleuvre avant le chapeau, que le Président de la République française n’exprime aucune félicitation à l’égard de Liu Xiabo pour son prix Nobel que l’intellectuel savoure en prison. Ce pauvre Bernard a perdu une nouvelle occasion de démissionner avant d’être remercié.

Pauvre Bernard car, il fut un temps où, le suivant dans ses pérégrinations comme journaliste, j’avais une certaine admiration pour ce french doctor : en Azerbaïdjan quand il dirigeait le ravitaillement des assiégés du Nagony-Karabak, à la frontière de la Turquie et de l’Irak quand il volait au secours des réfugiés kurdes, en Afghanistan quand il aidait les rebelles cernés par l’armée russe, au Kosovo quand il essayait courageusement de réconcilier les Serbes et les Kosovars sans rester dans son bureau, quand il chantait l’Internationale avec un général français en l’accompagnant au piano et même en Somalie où il portait les sacs de riz, et pas seulement pour la photo.

Ce pauvre Bernard est mort du désir d’exister, mort de crever du désir de « faire quelque chose » alors qu’il s’ennuyait. Ce pauvre Bernard est politiquement décédé d’avoir cru ou voulu faire semblant de croire qu’un homme portant des valeurs humanitaires de gauche pouvait collaborer avec la droite.

Ce pauvre Bernard est prématurément décédé, politiquement et humainement, d’avoir cru, ou voulu faire semblant de croire que l’humanisme pouvait être de droite et que la morale républicaine internationale pouvait exister à droite.

Dommage. Autrefois je l’aimais bien. Notamment le jour où pour devenir le ministre de la Santé de Jospin, il fuma sa dernière cigarette sur le tarmac de Pristina. Sa dernière cigarette de condamné. Un condamné que ses derniers amis ont abandonné, les autres étant morts dans l’attentat qui les tua à Bagdad…

A 71 ans, ce pauvre Bernard n’est plus qu’un mort vivant.

Vendredi soir, le pauvre Bernard a précisé qu’il ne savait pas encore comment la France serait représentée à la cérémonie de la remise du prix Nobel de la paix alors que les USA et la plupart des pays européens ont expliqué que leurs ambassadeurs seraient présents…

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