Quelle transition ?

Denis Sieffert  • 20 janvier 2011 abonné·es

Fondé en 1983 par l’avocat Ahmed Nejib Chebbi, le Parti démocrate progressiste (PDP) occupe une place à part dans le panorama politique tunisien. C’est un mouvement pluraliste qui a joué la carte de la légalité, permettant à différents courants, dont certains issus du marxisme, de préserver une certaine visibilité dans la société tunisienne au cours des années Ben Ali. Pour Adnane Ben Youssef, représentant du PDP à Paris, le dialogue doit s’ouvrir avec tous ceux qui en acceptent les règles. Tout le contraire de ce que propose le Premier ministre, Mohammed Ghannouchi, qui écarte du gouvernement d’union nationale le Parti communiste des travailleurs ou les islamistes d’Ennahda, interdits depuis 1992 (voir pp. 4 et 5).

Le PDP ne fait aucune exclusive : « Dans le cadre du processus en cours,
et dont l’armée se porte garante, nous sommes même prêts à discuter avec des personnalités issues du Rassemblement constitutionnel démocratique [RCD, parti de Ben Ali, ndlr], précise-t-il, pourvu qu’elles ne soient pas corrompues et n’aient pas de sang sur les mains. »
S’il n’est pas défavorable à un processus conduisant à une constituante, il le juge « périlleux dans l’état actuel des choses » parce qu’il risque d’entretenir « trop longtemps une situation transitoire » . « La société tunisienne a été complètement déstructurée par la dictature. Le peuple sort tout juste d’une longue période d’invisibilité » , rappelle-t-il. Tirant le bilan du soulèvement populaire, il insiste sur le rôle d’Internet, déjà expérimenté lors des manifestations de Gafsa en 2008 : « Dès les premiers jours de manifestations, les militants ont compris l’importance de l’information et de la mobilisation par Internet. Une Agence du mouvement de la rue s’est créée, et a accompli un vrai travail de vérification de l’information. » Elle a été ensuite relayée par Al-Jazira, touchant peu à peu toute la société. Depuis lundi soir, le PDP fait potentiellement partie du gouvernement d’union nationale, qui ne correspond pas à sa vision de l’ouverture. « Certes , reconnaît Adnane Ben Youssef, mais il y a aussi des figures centrales du syndicalisme, comme Abdel Jelil Bedoui, l’un des principaux dirigeants de l’UGTT, qui est intégrée au gouvernement. » Mais qui viennent de refuser d’y participer. Ambigu le PDP ?

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Tunisie : la révolution de l'espoir !
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