Un sang d’encre

Bakchich s’arrête et la Tribune est en sursis : deux situations bien différentes qui disent les difficultés actuelles de la presse.

Jean-Claude Renard  • 27 janvier 2011 abonné·es
Un sang d’encre

Créé en 2006 par Nicolas Beau et Xavier Monnier, Bakchich dépose aujourd’hui son bilan. In fine , le premier quotidien à s’afficher en ligne n’aura jamais connu le bon modèle économique. À l’automne 2009, faute de recettes publicitaires nécessaires, le titre s’était doté d’une version papier hebdomadaire en kiosque, paradoxalement pour sauver le site du dépôt de bilan. Nicolas Beau, son patron, espérait alors en vendre 50 000 exemplaires. Les chiffres se sont arrêtés à 7 000. Le journal invoque des aides à la presse en ligne en dessous des attentes et le manque de rédacteurs chevronnés pour encadrer les plus jeunes. Ce sont maintenant quinze journalistes à la porte.

Autre cas, bien différent : plongé dans les affres financières, le quotidien économique indépendant la Tribune est maintenant placé par le tribunal de commerce de Paris en procédure de sauvegarde pour une durée de six mois, éventuellement renouvelable. Une procédure qui est réservée aux seules entreprises qui ne sont pas en cessation de paiement, permettant la poursuite des activités. Sera-ce suffisant pour trouver les 15 millions d’euros nécessaires à la recapitalisation du journal (dont les pertes s’élevaient en 2010 à 9 millions d’euros, contre 14 millions en 2009), selon la direction ? Cette procédure est reçue de façon optimiste, comme « une opportunité » , estime Valérie Decamp, PDG du quotidien. Pour François Lenglet, directeur des rédactions et vice-président, « il s’agit d’une disposition qui va permettre à la Tribune, en gelant temporairement le remboursement de ses dettes, de finaliser le plan de relance et de recapitalisation qui avait été annoncé en juillet 2010 » . En somme, se trouver dans les meilleures dispositions dans la quête d’investisseurs.

Les dirigeants restent inchangés, ­désormais assistés par un administrateur désigné par le tribunal. Alain Weill avait racheté le journal à LVMH en 2008 (avec une première vague de départs à la clé suivant la clause de conscience), avant de le céder pour un euro, en mai dernier, à Valérie Decamp.
Au pied du mur, le quotidien affiche cependant des chiffres rassurants, sinon prometteurs en 2010 : des pertes d’exploitation réduites de moitié par rapport à 2007 et une croissance en diffusion de 2,4 %. Si jamais la Tribune venait à tomber, Bernard Arnault, patron de LVMH et des Échos, deviendrait le seul à tirer les ficelles de la presse économique.

Médias
Temps de lecture : 2 minutes