Des photos et des histoires

Les 42es Rencontres photographiques d’Arles dévoilent, entre autres, des négatifs inédits de la guerre d’Espagne et une rétrospective sur la révolution mexicaine.

Jean-Claude Renard  • 28 juillet 2011 abonné·es

Différences de taille. Les Rencontres photographiques d’Arles couvrent tout l’été, articulées autour d’images dites « artistiques », tandis que Visa pour l’image, à Perpignan en septembre, s’occupe de photojournalisme. Ici et là, une quarantaine d’expositions réparties dans les lieux historiques de chaque ville. Gratuites en Roussillon, elles sont chères en Provence (3 à 11 euros).
Cette 42e édition arlésienne a pourtant fort à voir avec le photo­journalisme, avec la fameuse « valise mexicaine » contenant les négatifs de la guerre d’Espagne signés Robert Capa, Gerda Taro et David Seymour, égarée depuis 1939 et retrouvée à Mexico en 2007.

Défraîchie comme un album, elle renferme 4 500 négatifs (où l’on observe combien la première image, sans retouche, est la bonne). Madrid sous le flot des bombes, le camp de réfugiés à Argelès, Hemingway en transe de rigolade, les combats et les moments de répit sur les fronts, des portraits, des colonnes en marche, des fusillades en recoin, des brigadistes ­éparpillés, synecdoque d’une guerre virant internationale. Exposée pour la première fois en Europe, cette légendaire valise contient notamment les ultimes images de Gerda Taro, écrasée par un char franquiste sur le front de Brunete, en 1937. Valoche égarée, conflit tragique, et cette rayonnante amoureuse saisie par Capa, son compagnon : de l’histoire dans l’histoire, de l’émotion dans l’émotion.

Pas moins mythique, la révolution mexicaine. Arles en présente une ample rétrospective, riche de tirages d’époque, revenant aux balbutiements de la photographie documentaire, et figée. Autre époque, autre monde, entre sombreros et caisses d’armes, entre Zapata et Pancho Villa, calés dans la grandiloquence. Parmi neuf expositions, Viva la revolución s’inscrit dans l’année du Mexique, que le festival a maintenue, livrant un panorama d’hier à aujourd’hui.

Avec Fernando Montiel Klint, peu de paysages, beaucoup d’existences. Des putes aux sorcières, des immigrés à New York aux chamans. Dans ce patrimoine vivant, le photographe se distingue en affichant une cosmogonie aux images trempées de lumières qui se voudraient divines. Actes de foi , s’intitule la série. Dans le cadre, des mises en scène inquiétantes, êtres isolés, bougres d’ânes et d’andouilles béats attendant la délivrance (ou la révélation).

Le photographe traque la fleur des nerfs dans les couleurs chaudes, un idéal mystique dans un décor acidulé, imposant des poses insolites à ses modèles. S’amuse, s’interroge, raconte des histoires, entraînant le spectateur dans ses illuminations. Ici, la photographie se fait récit.

Culture
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