Les opportunistes de l’écologie

Borloo renonce, Lepage débarque, Hulot flotte : confusion chez les écolos centristes.

Patrick Piro  • 13 octobre 2011 abonné·es

En l’espace de quelques jours, trois candidats marqués par l’écologie et le centrisme ont effectué un ballet d’entrées-sorties sur la scène politique de la course à l’Élysée. Jean-Louis Borloo jette l’éponge alors que sa candidature semblait acquise ; Corinne Lepage annonce la sienne dans la foulée ; et Nicolas Hulot « ne sait pas ce qu’il va faire », mal remis de sa défaite à la primaire d’Europe Écologie-Les Verts (EELV).

Ces valses illustrent deux débats non tranchés. Le plus ancien, c’est l’éternel dilemme du centre en France : est-il possible d’exister entre la gauche et la droite ? Le second, récent : comment ratisser les nombreuses voix sensibles à l’écologie au sein de ce milieu volatile ? Examen des motivations.

Borloo, carrière d’abord

C’est un candidat quasi certain qui renonce, le 2 octobre, arguant que « la dynamique des centres n’est pas suffisante pour être présent au deuxième tour de l’élection présidentielle » . Qui peut y croire ? Borloo, cofondateur de Génération écologie en 1993, ministre de l’Écologie jusqu’à l’année dernière, a incarné l’atout maître de la stratégie de Nicolas Sarkozy pendant les trois premières années de son mandat : siphonner les voix écolos du centre, en surfant sur le Grenelle de l’environnement.

C’était bien parti, mais les sondages n’ont pas suivi, et Sarkozy a mis fin à la mascarade. Borloo a-t-il sincèrement cru qu’il pouvait ramasser la mise pour son compte ? Il a en fait appliqué son vrai plan A : une fois son petit pactole de sympathie électorale évalué par les sondages (entre 5 et 9 % des intentions, pas si mal), ne pas emmerder Sarko plus avant, ça peut valoir récompense (Premier ministre un jour ?).

Lepage, stratégie perso

Une candidature déclarée le 4 octobre, deux jours après l’abandon de Borloo… C’est la date anniversaire de la promulgation de la Ve République, qu’elle veut abolir, rétorque-t-elle aux railleurs. Quoi qu’il en soit, elle se fait brocarder par ses proches « voisins politiques » – le Modem et EELV. Son copinage avec le parti de Bayrou est rompu car le style du leader est trop perso. Cohn-Bendit s’éreinte à la séduire, mais elle ne rejoint pas EELV, « trop à gauche ».

En fait, il y a toujours quelque chose qui cloche, constate un proche, qui donne la clé : elle est incapable de travailler avec les autres. L’avocate gère donc pour elle-même et son petit parti, Cap 21, sa notoriété de spécialiste des causes environnementales, ancrée dans un centre qu’elle se garde de définir – un peu à gauche, un peu à droite. Pour négocier, en 2012, un maroquin, des députés ?

Hulot, mystère

Il tente en quelque sorte le tout pour le tout, en avril dernier, quand il décide d’un même élan d’entrer dans l’arène politique et de briguer l’investiture écologiste. Il est habité par la conviction que son profil réconciliateur est un argument suffisant. Pour une partie de l’état-major écolo, le filet Hulot est en effet taillé pour faire le plein des voix d’un électorat sensible à l’écologie mais peu politisé (souvent au centre, donc).
Patatras, ça ne marche pas. Hulot a ajourné la rencontre prévue fin septembre avec ses sympathisants, faute de propositions à leur faire. Puis on le voit dîner avec Borloo fin septembre, entretenant à nouveau la confusion. La politique comme un joujou ?

Écologie
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