Grande lessive à RFI

Après sa fusion avec France 24, sur fond de plan social, la station craint de perdre son ouverture sur le monde.

Jean-Claude Renard  • 12 avril 2012 abonné·es

«France Bleu Afrique ». C’est ainsi que certains imaginent déjà ce qu’il restera de RFI si les réformes imposées par la direction, menée par Anne-Marie Capomaccio et Nahida Nakad, se poursuivent. Toutes deux ont été nommées en mars, après qu’Alain de Pouzilhac a annoncé en décembre que la fusion entre RFI, France 24 et Monte-Carlo Doualiya allait « offrir à ceux qui le veulent de nouvelles perspectives de carrière, des audiences supérieures, des parts de marché encore plus importantes, une plus grande qualité de notre contenu, une présence renforcée et des équipes plus diversifiées ».

La réalité est tout autre, avec une grille de programmes qui se dessine « allégée » dès cet été. Jusqu’ici coexistaient deux grilles au sein de la radio : l’une tournée vers l’Afrique, l’autre sur le monde. « Trop lourdes », juge la direction. La première semble éliminer la seconde, dans un plan social prévoyant 126 départs au sein de ­l’Audio­­visuel extérieur de la France (AEF), dont au moins 80 à RFI, touchant principalement des journalistes (le plan social de 2009 avait déjà entraîné déjà 206 départs).

Une lessive qui sent le règlement de comptes à l’égard du Syndicat national des journalistes (SNJ), fervent opposant à la fusion. Ainsi, Daniel Desesquelle, élu SNJ au conseil d’administration, se voit supprimer son émission hebdomadaire « Carrefour de l’Europe », une des rares émissions ­européennes. Sébastien Jedor, élu SNJ au comité d’entreprise, est retiré de l’antenne Afrique pour la préparation des journaux matinaux, au profit de son homologue de l’antenne Monde.

De son côté, Pascal Paradou, qui animait avec finesse sa quotidienne « Culture vive » depuis novembre 1999, est obligé de céder son émission à Jean-François Cadet (qui assurait la tranche d’info généraliste, maintenant supprimée). Motif : trop « parisianiste » et « élitiste », pas assez tourné vers l’Afrique. Ou, précisons-le, lui aussi élu du personnel SNJ. Mais, ce qui inquiète le journaliste, « c’est la place de la culture à l’antenne ». Car son émission n’est pas seule à disparaître : « Cinémas d’aujourd’hui », l’hebdo­madaire de Catherine Ruelle, et « Littérature sans frontières », de Sophie Ekoué, passent également à la trappe du plan social, sans être remplacées.

Dans les dommages collatéraux produits par la direction, accusée de vouloir déstabiliser les salariés, selon un communiqué FO, CGT, SNJ et SUD-RFI, « par des pratiques managériales ignobles », reste aussi le réseau de correspondants, tous loin de Paris et loin de l’information, qui se demandent déjà à quelle sauce ils seront mangés.

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