« Il faut un fonctionnement le plus intégré possible »
Membre fondateur du Front de gauche, Christian Picquet évoque ici l’avenir de ce rassemblement.
dans l’hebdo N° 1200 Acheter ce numéro
Tout le monde est d’accord pour continuer le Front de gauche ?
Christian Picquet : Pour tous, la preuve est faite que lorsque nous nous rassemblons sur une base politique précise, claire et argumentée, nous pouvons rassembler des foules considérables et construire une dynamique comme il n’en avait plus existé dans une campagne électorale depuis les années du Programme commun.
La répartition des circonscriptions législatives ne pose plus de problèmes ?
Les débats ont eu lieu, et les désaccords ont été tranchés. On ne va pas rouvrir la boîte de Pandore à quelques semaines d’un scrutin dont l’enjeu prioritaire est qu’un groupe Front de gauche, le plus puissant possible, pèse fortement sur la majorité qui naîtra de la défaite de Sarkozy le 6 mai.
Une autre manière de peser serait d’entrer au gouvernement…
Il est légitime que cette question soit posée et débattue. Le Front de gauche a vocation à gouverner ; il a affirmé d’emblée que son objectif était de créer les conditions d’une majorité qui gouverne contre les marchés financiers et au service du plus grand nombre, en réponse aux attentes populaires. Si Sarkozy est sévèrement battu comme nous l’espérons, la question du gouvernement doit être discutée ouvertement. Mais nous avons dit, tous ensemble, que nous n’irions pas dans un gouvernement qui ferait l’inverse de ce que nous avons défendu devant le pays. En l’état, François Hollande dit que son programme est à prendre ou à laisser. Nous ne pouvons que laisser, dès lors qu’il est loin d’être à la hauteur des exigences du moment.
Comment pérenniser le Front de gauche et intégrer tous ceux qui se sont investis dans la campagne sans être membres d’une de ses formations ?
Avec Gauche unitaire, je reste favorable, à terme, à la naissance d’une nouvelle formation politique commune. Aujourd’hui, les conditions ne sont pas réunies. La question est de faire évoluer le Front de gauche d’un cartel assez largement électoral, qu’il était au départ, vers une construction politique qui agisse comme une véritable force politique.
Pour la présidentielle, une coordination politique décidait chaque semaine avec le candidat des orientations de la campagne ; des personnalités et acteurs du mouvement social nous apportaient leur expérience ; et des milliers de militants étaient engagés dans des assemblées citoyennes. Il faut poursuivre dans ce sens avec un fonctionnement le plus intégré possible : que les organisations soient capables de décider d’objectifs communs à tous les moments de la vie politique et sociale, qu’elles mutualisent une partie de leurs moyens et trouvent une façon d’associer à cette construction personnalités et militants de terrain.
Le Front de gauche compte sept formations. N’est-il pas envisageable d’en regrouper ?
Si on peut réduire un peu cet éparpillement, c’est bien. Il faut d’abord vérifier que l’on a la même orientation politique sur le fond et le même point de vue du rapport au Front de gauche. Pour moi, son caractère incontournable est démontré, et il doit continuer à orienter son action vers le cœur de la gauche. Il existe, dans l’aire socialiste comme dans l’aire écologiste et le mouvement social, des secteurs en attente d’une autre perspective, proche de celle que nous avons défendue. Notre orientation vise à refonder la gauche dans son ensemble sur une nouvelle politique. Le Front de gauche agit au nom de ce qu’il pense être l’intérêt de toute la gauche ; cela exclut tout tropisme vers les attitudes de proclamation et d’extériorité qui sont traditionnellement celles de l’extrême gauche.
Que dites-vous de l’idée de Jean-Luc Mélenchon d’organiser une convention nationale du Front de gauche ?
Ça peut être un moyen de traduire concrètement l’avancée que le Front de gauche pourrait réaliser en respectant l’existence souveraine de chacune de ses composantes. Je la reçois comme une proposition mise dans le débat et susceptible de concrétiser ce qui me paraît aujourd’hui faire consensus à l’intérieur du Front de gauche.