Par villes et par gens

Douze photographes réunis au pavillon Carré de Baudouin, à Paris, sur le thème de l’espace urbain.

Jean-Claude Renard  • 26 avril 2012 abonné·es

Bicentenaire de l’indépendance haïtienne en 2003. Caroline Pottier est sur place pour croquer du portrait, celui des héritiers de la première république indépendante d’une population majoritairement noire, en 1803. Des petites gens, en noir et blanc. Des couturières dans un atelier, un gosse à l’école, une femme dans une épicerie. Des portraits portés par les tensions, une densité éclaboussant le cadre. En 2012, la photographe se concentre sur d’autres Haïtiens, exilés à Paris et en banlieue. Des plans serrés, en couleur. Une diaspora débarquée de la campagne, plongée dans le bitume.

Le travail d’André Lejarre s’inscrit dans un autre espace. Du côté de Belleville. Où il encastre dans l’objectif, à coups de panoramiques, le foisonnement des couleurs, les multiplicités ethniques. Des images disposées en regard de celles, en noir et blanc, réalisées voilà près de vingt ans aux mêmes endroits, livrant pareilles effervescence et diversité.

Changement de décor : la Mongolie, terre de yourtes, de grands espaces de steppe désolée. Aujourd’hui, la population quitte la tente circulaire pour les barres d’immeubles, des baraquements de fortune à Oulan Bator. Lucile Chombart de Lauwe a saisi cette transition glaciale, d’un habitat à l’autre, avec ses bouleversements de pratiques domestiques et sociales. Entassement où l’on n’est pas moins isolé.

Retour à Belleville : Belleville-sur-mer, en Seine-Maritime, qui a connu une expansion urbaine avec la construction d’une centrale nucléaire à deux encablures, une expansion qui semble s’arrêter à mi-chemin entre la ville et la campagne, modifiant le paysage, fixée par Sophie Carlier.

Dans l’Est parisien, le pavillon Carré de Baudouin expose ainsi douze photographes du collectif Bar Floréal, inspirés par la ville. Entre masses, volumes, graphismes aléatoires, signalétiques et populations, c’est bien la notion de territoires urbains et celle du vivre-ensemble qui sont interrogées ici. Des centres-villes, des périphéries, et ce qu’il y a dedans. Des villes vibrant de passages, de silhouettes, où les visages et les langues se croisent, des villes chargées d’histoire culturelle. Ni tout à fait les mêmes ni tout à fait différentes. Parce qu’ici ou là, la ville se fait lieu de transition, de mutation, de migration. Un théâtre de la vie avec lequel il s’agit de négocier.

Culture
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