Un front indigène à Rio

Bien organisés, les Indiens du Brésil réclament le respect de leurs droits
à la terre et l’arrêt de la construction du barrage de Belo Monte.

Patrick Piro  • 28 juin 2012 abonné·es

Les communautés indigènes ont imprimé une forte marque colorée à Rio. Elles annonçaient près de 1 500 des leurs, venus pour défendre leurs intérêts auprès de la conférence officielle Rio+20 et participer au Sommet des peuples des altermondialistes. Un joli coup de communication, avec ses petits intérêts mercantiles : de l’artisanat indien à la portée du militant blanc, qui sollicite régulièrement la photo au côté d’une peau cuivrée et dûment maquillée. Ici, le folklore est habilement détourné pour la bonne cause. « Jamais nous n’avons eu le sentiment d’être aussi forts, nous pouvons les battre », affirme Megaron Txucarramãe, neveu du célèbre cacique Raoni, dont il est en train de prendre la relève chez les Kayapós.

Les différentes communautés ont organisé une marche dans la ville et sont allées remettre leurs doléances à un ministre brésilien présent à Rio+20. Avec la demande permanente du respect de leurs droits à la terre, trois revendications majeures : l’abandon d’une proposition d’amendement à la Constitution (Pec 215) visant à transférer les questions foncières indigènes du pouvoir exécutif au Congrès, où pèse un fort parti « ruraliste » braqué contre la préservation de l’Amazonie ; l’interdiction des mécanismes de création de crédit carbone sur le dos des forêts ; et surtout l’arrêt de la construction de Belo Monte sur le fleuve Xingu. Ce mégabarrage – qui serait le troisième au monde par la puissance de sa production électrique – a obtenu une approbation finale en 2011, en dépit de nombreuses contestations sur la validité des études d’impact. Le début des travaux a cristallisé un mouvement de résistance qui a des échos dans tout le Brésil et au-delà. La future montée des eaux, qui va noyer plus de 6 000 km2 de terre, provoquerait le déplacement de 25 000 indigènes (des Kayapós principalement) mais aussi de nombreux paysans. « Malgré vingt-trois ans de lutte, le gouvernement ne nous écoute pas et ne nous respecte pas, martèle Megaron Txucarramãe. Nous sommes prêts à aller plus loin dans la lutte… Nous devons nous unir ! » L’association Xingu vivo, qui coalise les opposants, fait état d’une montée de la violence dans la ville d’Altamira, principale agglomération à proximité de Belo Monte, en raison des déplacements de population mais aussi des manœuvres d’intimidation exercées sur les opposants. La Cour interaméricaine des droits humains a été saisie pour obtenir l’arrêt des travaux.

Écologie
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